Déclaration au CSA ministériel du 3 avril 2023

Mesdames et Messieurs les membres du CSA,

Les personnels de l’Éducation nationale sont fortement mobilisés depuis maintenant plus de deux mois contre la réforme des retraites que tente de nous imposer votre gouvernement. La réforme des retraites incarne, dans son contenu comme dans sa procédure d’adoption, un modèle de société que nous combattons.

M. le ministre, vous avez déclaré en 2020 au micro d’une radio de service public que les violences policières constituent une “réalité évidente” et évoqué à ce sujet une “discrimination systémique”. Ces derniers jours, la presse a diffusé des enregistrements qui jettent de nouveau une lumière crue sur une institution gangrenée par des pratiques et une idéologie racistes, sexistes, homophobes et antisémites. Les cortèges syndicaux sont attaqués par la police lors des manifestations.. Des représentants et représentantes syndicales de SUD éducation sont régulièrement interpellé·es puis relâché·es sans qu’aucune charge ne soit retenue contre elles et eux. Un cheminot de SUD Rail a perdu un œil alors qu’il manifestait avec ses camarades. Les lycéens et lycéennes mobilisé·es sont réprimé·es brutalement.

Pourtant, on ne vous entend pas aujourd’hui dénoncer les exactions policières systémiques dont font l’objet en France les opposant·es à ce projet de réforme comme aux grands projets inutiles. Le ministère de l’Éducation nationale doit garantir le droit des lycéen·nes à se mobiliser.

L’obligation de travailler deux ans de plus pénalise l’ensemble des travailleurs et des travailleuses et aggrave la précarité pour celles et ceux qui sont le plus discriminé·es dans le monde du travail : les femmes, les personnes racisées, les personnes handicapées. De plus, l’action du gouvernement devrait être guidée par un objectif de reconversion écologique de la société. Cette réforme des retraites a un impact environnemental négatif puisqu’elle a pour finalité d’accélérer le passage vers le financement individuel de la retraite par capitalisation adossée aux marchés financiers au détriment du système de solidarité de la retraite par répartition. C’est un cadeau du gouvernement aux fonds de pensions, aux banques et aux assurances, dont les marchés sont globalement tenus par les grandes compagnies pétrolières responsables de la situation planétaire d’urgence climatique.

Cette réforme s’inscrit dans le modèle productiviste et écocide du “travailler plus pour produire plus” alors que la finitude des ressources et la très grave crise écologique à laquelle nous faisons face nous imposent au contraire de réduire nos consommations, donc notre production, en réfléchissant aux besoins qui sont essentiels.

C’est pourquoi nous rappelons ici notre revendication de l’abandon du projet de réforme des retraites.

Les personnels de l’Éducation nationale expriment dans leur mobilisation l’aspiration à une société, mais également à une école, plus juste, plus démocratique et plus écologique.

Il faut l’entendre. Le ministère de l’Éducation nationale ne peut continuer à imposer ses mesures impopulaires aux personnels. Les personnels font un bilan négatif des évaluations nationales et vous décidez pourtant de les imposer en CM1 et en quatrième.

Le CSE a émis un avis défavorable aux textes portant transformation de la classe de sixième au collège avec la suppression de la technologie, l’instauration d’une heure de soutien/approfondissement et la généralisation de l’accompagnement aux devoirs. Il est urgent d’entendre et de respecter cet avis.

La transformation de la sixième, que vous portez, répond uniquement à des impératifs politiques de promotion du Pacte. Or le Pacte est déjà rejeté par les personnels qui ont bien compris que le ministère utilise les promesses de revalorisation comme un cheval de Troie pour leur faire porter la pénurie de personnels et l’augmentation du temps de travail. SUD éducation revendique une augmentation des salaires sans aucune contrepartie.

Enfin, nous souhaitons vous alerter au sujet de l’école inclusive. Le ministère de l’Éducation nationale ne peut continuer à cacher derrière la vitrine de l’école inclusive la maltraitance subie par d’une part les élèves dont les besoins spécifiques nécessitent des moyens supplémentaires : les élèves en situation de handicap, les élèves allophones et les élèves en difficultés scolaires, et d’autre part les personnels qui travaillent avec eux.

La mise en oeuvre de l’école inclusive doit faire l’objet d’un véritable effort budgétaire afin de baisser le nombre d’élèves dans les dispositifs et en particulier dans les UPE2A qui accueillent parfois jusqu’à 22 élèves allophones et de baisser le nombre d’élèves par classe pour permettre l’inclusion scolaire des élèves qui dépendent des dispositifs d’inclusion ou qui bénéficient de notifications de la MDPH.

Les conditions de scolarisation des élèves en situation de handicap est scandaleuse : les personnels ne sont ni accompagnés, ni formés pour adapter leurs enseignements aux difficultés de ces élèves. Les personnels AESH qui les accompagnent sont sous payés, pas assez formés, en nombre insuffisant et méprisés dans leur travail. Pourtant sans AESH, il n’y a plus d’inclusion scolaire. La mutualisation est une mauvaise réponse au manque de personnels AESH. La mutualisation et les Pial ont dégradé l’accompagnement puisque l’accompagnement n’est pas défini par les besoins des élèves mais par les moyens disponibles. Plus il y a de notifications dans un Pial, moins les élèves notifiés sont accompagnés. L’école inclusive a besoin des AESH, c’est pourquoi il faut garantir à ces personnels des conditions de travail dignes, un salaire complet et un vrai statut pour reconnaître qu’AESH, c’est un vrai métier.

Enfin nous rappelons que les AESH constituent le 3e plus gros corps de l’Éducation nationale en nombre de personnels, plus de 90% des 132000 AESH sont des femmes. Le ministère de l’Éducation nationale a la responsabilité de réduire les inégalités de salaires entre les hommes et les femmes. Un des leviers sera d’octroyer un vrai statut avec un vrai salaire à temps plein pour les AESH. Le ministère de l’Éducation nationale ne peut continuer à balayer d’un revers de main cette revendication des personnels. C’est une nécessité pour l’école inclusive et c’est une nécessité pour combattre les inégalités salariales. Les 10% d’augmentation salariale pour les AESH et le passage au CDI après trois ans de CDD sont des mesures insuffisantes et très en-deçà des besoins. SUD éducation s’adresse au ministère de l’Éducation nationale à l’occasion de ce CSA pour revendiquer la création immédiate d’un vrai statut de la Fonction publique pour les AESH.