SUD éducation écrit à l’Express suite à l’article du 22 mars portant sur la fédération SUD éducation

M. le directeur de publication de L’Express

Mmes et MM les journalistes

112 avenue Kléber

75116 Paris

Objet : votre article en date du 22 mars dernier portant sur la fédération SUD éducation

Mesdames et Messieurs les journalistes,

Nous avons pris connaissance de votre article intitulé Avec le syndicat SUD Éducation, c'est "la lutte des races" en salle des profs publié le 22 mars dernier.

Votre article appelle plusieurs remarques de notre part.

Le titre de l’article se fonde sur la mise en exergue du cas d’un collègue, dont l’article précise pourtant qu’il n’est pas adhérent de notre organisation syndicale. Rendre la fédération SUD éducation responsable de l’action de cette personne relève d’un procédé malhonnête. Qui plus est, SUD éducation est un syndicat en croissance qui compte plusieurs milliers d’adhérent-e-s : il est difficilement concevable que les agissements isolés d’un individu puissent être mis sur le compte de SUD éducation.

Par ailleurs, il n’y a pas de “tournant idéologique” à SUD éducation, contrairement à ce que l’article laisse entendre. Notre fédération s’emploie avec vigueur depuis sa fondation il y a plus de vingt ans, comme l’indiquent nos statuts, à “participer à la construction d’un syndicalisme de lutte et de transformation sociale, indépendant du patronat, de l’État et de tout groupe politique ou religieux”. Qui plus est, depuis cette date, SUD éducation revendique sans discontinuer et avec force la socialisation de l’enseignement privé, en particulier confessionnel, dans un grand service public d’éducation laïque, gratuit et émancipateur.

Dans cette perspective, il est de notre responsabilité d’organisation syndicale d’interroger les phénomènes de discrimination qui traversent l’école, qui n’est pas isolée du reste de la société. Les discriminations raciales en font partie. La discrimination au nom d’une religion réelle ou supposée aussi. SUD éducation ne s’interdit pas de nommer les choses par leur nom, l’islamophobie, notamment lorsque le Ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, choisit explicitement de ne pas soutenir une mère d’élève qui, accompagnant une sortie scolaire tout en portant le voile comme le lui permet la loi, est agressée par un élu du Rassemblement national. Plus récemment, c’est une représentante de l’Unef qui a été la cible d’un déchaînement de critiques car elle a répondu aux questions d’une commission de l’Assemblée nationale en portant le voile, n’enfreignant ce faisant nullement le principe de laïcité. Le ministre Banquer à la suite de cet événement a répandu dans le débat public le qualificatif d’« islamo-gauchiste », un vocable tout droit issu du vocabulaire nauséabond de l’extrême-droite.

À cet égard, SUD éducation s’est tenu du côté de l’État de droit, quand le ministre de l’Éducation se proposait de changer la loi puisqu’elle ne lui convenait pas.

Il nous semble difficilement compréhensible enfin de mêler cette question à celle de la lutte dans nos universités, écoles et établissements pour améliorer les conditions de travail des personnels et les conditions d’étude des élèves. SUD éducation ne s’est jamais, depuis sa fondation, caché d’être un syndicat combatif : nous gagnons par la mobilisation et par le rapport de force. Les camarades du collège République à Bobigny sont à cet égard effectivement un exemple de répression antisyndicale menée par l’administration contre une section qui lutte pour un service public de qualité.

SUD éducation se bat au quotidien pour faire respecter le droit du travail quand l’Éducation nationale est le plus gros employeur de salarié-e-s précaires du pays (très majoritairement des femmes). Quand cent-dix mille AESH, 90% de femmes, gagnent moins de 900 euros par mois, que l’incurie du ministre et du gouvernement sont chaque jour plus perceptibles en ce qui concerne la gestion de la crise sanitaire dans l’Éducation nationale, il nous semble que ces questions méritent bien davantage l’attention de votre publication.

Si vous semblez vous en inquiéter, la diffusion de nos pratiques de luttes solidaires, unitaires, et démocratiques est pour SUD éducation et ses adhérent-e-s, comme pour l’Union syndicale Solidaires dont elle est membre et partage pleinement les orientations, une excellente nouvelle.

Veuillez croire, M. le directeur de publication, mesdames et messieurs les journalistes, à notre attachement au service public d’éducation,laïque, gratuit, et émancipateur pour toutes et tous.