Pour une autre politique de l’immigration

Motion d’actualité

La ques­tion de l’immigration , au-delà des aspects sans-papiers et deman­deurs d’asile qui sont les plus cruels, est un pro­blème majeur qui ne peut plus être ignoré.

Les causes pro­fondes de l’immigration sont tou­jours les mêmes : misère et persécutions.

La res­pon­sa­bi­li­té en incombe lar­ge­ment aux poli­tiques de pau­pé­ri­sa­tion menées dans les pays du Sud par le Fonds Monétaire International (FMI), l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et la Banque Mondiale sou­mise à la dic­ta­ture des firmes multinationales.

Ces causes sont occul­tées et l’opinion publique mani­pu­lée par des pou­voirs hypo­crites et déma­gogues qui, en stig­ma­ti­sant les immi­grés, sus­citent les peurs, les amal­games ‑immi­gra­tion= inva­sion =insé­cu­ri­té – et conduisent des poli­tiques répres­sives – fer­me­ture des fron­tières, contrôles, fichages…

Aujourd’hui, après la LSQ de gauche (loi de sécu­ri­té quo­ti­dienne) et la LSI de droite (loi de sécu­ri­té inté­rieure), ce gou­ver­ne­ment d’une droite dure vient de voter des lois sur la maî­trise de l’immigration et le séjour des étran­gers qui contiennent de graves reculs en termes de droit, contri­buent à pré­ca­ri­ser davan­tage la situa­tion des émi­grés vivant en France et s’inscrivent dans un mou­ve­ment géné­ral vers une Europe-forteresse.

C’est plus que jamais « l’ère du soup­çon ins­ti­tu­tion­na­li­sé » (Gisti) à l’égard des étran­gers : sus­pi­cion sys­té­ma­tique, obses­sion de la lutte contre la clan­des­ti­ni­té, de la fraude, répres­sion accrue contre les sans-papiers et deman­deurs d’asile, cri­mi­na­li­sa­tion des sou­tiens ‑indi­vi­dus et asso­cia­tions, « les délin­quants de la soli­da­ri­té »- cou­pables d’avoir aidé des étran­gers en situa­tion irré­gu­lière. En fai­sant des sans-papiers les proies faciles d’une poli­tique ultra-sécu­ri­taire, Sarkozy court après l’électorat frontiste.

C’est une poli­tique irres­pon­sable qui ali­mente la xéno­pho­bie et le racisme, le ter­reau des fas­cismes et des intégrismes.

L’Europe se construit donc, har­mo­nise dans un sens très répres­sif et, pour gérer les flux migra­toires, dur­cit les atti­tudes : sur­veillance accrue des fron­tières, allon­ge­ment de la réten­tion, pos­si­bi­li­tés de réad­mis­sion dans les pays d’origine, coopé­ra­tion poli­cière dans la lutte contre l’immigration clan­des­tine, exten­sion des fichiers d’identification des sans-papiers, sélec­tion des bons can­di­dats à l’immigration (c’est-à-dire utiles aux éco­no­mies euro­péennes ), res­tric­tion du droit d’asile, orga­ni­sa­tion inter­na­tio­nale des « vols grou­pés », les expul­sions col­lec­tives par charters…

Les régle­men­ta­tions et les pra­tiques admi­nis­tra­tives dis­cri­mi­na­toires, basées sur la sus­pi­cion de fraude, répres­sives, fabriquent des rési­dents illé­gaux exclus de tout ce qui fonde la citoyenneté.

Ainsi, il y a, par­tout en France, dans les pays de l’Union euro­péenne, des Sans-Papiers. Quelques cen­taines de mil­liers. Des hommes et des femmes qui vivent dans la clan­des­ti­ni­té, la crainte quo­ti­dienne d’être arrê­tés et expul­sés, la pré­ca­ri­té, l’exploitation par des employeurs et des logeurs sans scru­pules, le non-droit. Et leurs enfants qui gran­dissent très tôt avec un sen­ti­ment d’exclusion, de peur per­ma­nente, de défiance, qui n’est pas sans consé­quences sur leur san­té, leur édu­ca­tion, leur socia­li­sa­tion et, d’une façon géné­rale, sur leur construc­tion. Voilà la véri­table insé­cu­ri­té qui touche les plus pré­caires des pré­caires : les sans-papiers, véri­tables esclaves modernes, et leurs enfants.

Il s’agit là de la néga­tion du droit des migrants, de la néga­tion des valeurs des Etats de droit.

« Nous ne sommes pas dan­ge­reux. Nous sommes en danger. »

Ce slo­gan des mani­fes­ta­tions de sans-papiers – ce cri – s’illustre tra­gi­que­ment quand la mort est au bout du che­min d’un sans-papiers, d’un deman­deur d’asile, d’un clan­des­tin qui fuit misère ou per­sé­cu­tion : morts, asphyxiés dans un camion fri­go­ri­fique, noyés au large des côtes ita­liennes ou dans le détroit de Gibraltar, de froid et d’épuisement dans la cam­pagne calai­sienne, à bord d’un avion au cours d’une expul­sion mus­clée ou par suicide.

Parce que nous sommes syn­di­ca­listes, fidèles aux valeurs de soli­da­ri­té inter­na­tio­nale que porte l’histoire du mou­ve­ment syn­di­cal, nous défen­dons les liber­tés, les droits essen­tiels de tous et nous sommes, concrè­te­ment, aux côtés de ceux qui en sont pri­vés, donc aux côtés des sans-papiers qui sont des tra­vailleurs. Nous refu­sons de réduire les étran­gers à leur fonc­tion éco­no­mique et exi­geons pour eux, avec eux, le res­pect des droits conquis par le mou­ve­ment syn­di­cal. Nous consi­dé­rons que le pro­blème de l’immigration est au coeur du mou­ve­ment social.

Au-delà de la soli­da­ri­té, le mou­ve­ment syn­di­cal est direc­te­ment concer­né : en effet, le jeu de la concur­rence sur le mar­ché de l’emploi entraîne plus ou moins l’alignement des tra­vailleurs sur les condi­tion de tra­vail et de rému­né­ra­tion des plus vul­né­rables ; il s’ensuit un ali­gne­ment par le bas :d’abord les sans-papiers, puis les étran­gers régu­la­ri­sés pré­caires, l’ensemble des étran­gers, enfin les Français eux-mêmes. Par conta­mi­na­tion, tous les tra­vailleurs sont touchés.

Les condi­tions d’emploi impo­sées aux sans-papiers sont celles dont rêvent les patro­nats de tous les pays :la situa­tion irré­gu­lière est une véri­table école de la flexi­bi­li­té et de l’exploitation, prête à se répandre ‑c’est déjà com­men­cé- dans l’ensemble du corps social et entraîne une dérè­gle­men­ta­tion sans fron­tière qui carac­té­rise la mon­dia­li­sa­tion libé­rale contre laquelle le mou­ve­ment social se mobilise.

Parce que nous vou­lons « une autre socié­té », une nou­velle poli­tique de l’immigration et une nou­velle loi sur l’accueil des étran­gers, SUD Education sou­tien­dra toute poli­tique prô­nant un autre modèle euro­péen oppo­sé à celui d’une Europe-forteresse,

pour :

  • le res­pect des droits des migrants ;
  • un titre de séjour pour chaque résident de fait sur le ter­ri­toire de l’UE ;
  • la pro­tec­tion et la garan­tie de l’accès aux droits ;
  • l’ ins­tau­ra­tion d’un sta­tut de résident euro­péen afin d’éradiquer les situa­tions d’étrangers sans titre ni droits ;
  • l’arrêt des expul­sions et la fer­me­ture des centres de réten­tion, ces « hor­reurs de la République » (dixit le rap­port Mermaz) ;
  • l’abolition réelle de la double peine ;
  • l’abrogation des lois Pasqua, Debré et Chevènement ;
  • la libé­ra­tion de tous les sans-papiers empri­son­nés pour délit de papiers ;
  • la régu­la­ri­sa­tion de tous les sans-papiers avec la carte de 10 ans ;
  • le prin­cipe – fon­da­men­tal – de la liber­té de cir­cu­la­tion et de la liber­té d’installation des personnes.
  • C’est le sens de notre signa­ture de l’« appel euro­péen à la régu­la­ri­sa­tion de tous les sans-papiers ».

SUD Education, conscient de la néces­si­té d’unifier la lutte des sans-papiers au-delà des fron­tières, d’aller vers une conver­gence au niveau euro­péen, par­ti­ci­pe­ra à toute entre­prise en ce sens pour impo­ser, avec la force de l’union, l’exigence de la régu­la­ri­sa­tion et une nou­velle poli­tique de l’immigration..

Depuis 1996, nous sommes aux côtés des sans-papiers. Nous le resterons.