Choc des savoirs : quels changements en vue ? 

Suite aux annonces inquiétantes du ministre Attal sur le “Choc des savoirs”, SUD éducation a déjà publié un matériel de décryptage : Choc des savoirs et inégalités : c'est NON !

Depuis, les organisations syndicales, dont SUD éducation, ont été reçues au ministère de l’Éducation nationale le 20 décembre afin d’en savoir davantage sur la mise en oeuvre des annonces ministérielles et des annonces ont été faites lors du CSA ministériel du 21 décembre. SUD éducation vous livre ici les principales informations à retenir.

 

→ Financement des mesures : La loi de finances 2024 prévoyait la suppression de 2 193 postes d’enseignant·es (1 709 dans le premier degré et 484 dans le second degré) mais le ministère a annoncé que cela serait modifié : finalement les suppressions de postes seraient limitées à 650 postes dans le 1er degré et 574 postes seraient créés dans le 2d degré pour permettre la mise en place des mesures du “choc des savoirs”, notamment les groupes de niveau en collège.

Créations et suppressions de postes : ventilation par académie

La suppression de l’heure de technologie en 6e est confirmée, et les dotations par classe de 6e diminuent d’une heure (25 heures au lieu de 26 heures) en raison de la diminution du volume horaire réglementaire suite au remplacement de l’heure de technologie par l’heure de soutien/approfondissement.

 

La fin du dernier mot aux familles sur le redoublement : le ministère prévoit de faire passer des textes en ce sens dans les premiers mois 2024.

 

Réécriture des programmes : le ministère prévoit une saisine imminente du Conseil supérieur des programmes pour que les programmes de l’école maternelle et du cycle 2 soient réécrits le plus rapidement possible. L’objectif affiché est d’avoir des nouveaux programmes au début du printemps 2024 pour la maternelle, le CP, le CE1 et le CE2 ;  en 2025 pour le CM1, le CM2 et la 6e ; en 2026 pour la 5e, la 4e et la 3e. Il y aura un focus sur la langue et les nombres côté école maternelle.

Les programmes revus récemment, en particulier ceux de maternelle, n’ont pas vocation à être largement remaniés.

Les nouveaux programmes devraient être raccourcis et recentrés sur les savoirs fondamentaux tout en intégrant des domaines d’apprentissage qui ne figuraient jusqu’à présent dans les programmes. Ces nouveaux programmes mettront davantage en avant les objectifs annuels voire infra-annuels qui remettent en cause la logique de cycle.

En parallèle, le ministère prévoit une réécriture du socle pour 2025.

 

Groupes de niveau : parmi les différentes pistes proposées par la mission Exigences des savoirs, le ministère a choisi la moins coûteuse mais aussi la moins pertinente selon la recherche scientifique : celle de groupes de niveau sur l'entièreté du volume horaire disciplinaire en mathématiques et en français au collège.

Le ministère prévoit de sortir dès janvier un arrêté sur l’organisation des volumes horaires au collège. SUD éducation s’oppose à la mise en place de ces groupes de niveau, qui ouvrent la voie à une remise en cause du collège unique, qui vont désorganiser les établissements et qui n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité.

Le ministère compte également imposer une généralisation des évaluations nationales à tous les niveaux du CP à la 3e malgré le bilan très négatif des syndicats sur ces évaluations. Les résultats à ces évaluations interviendront pour déterminer la dotation des collèges pour mettre en place les groupes de niveau.

La répartition des élèves dans les groupes de niveau se fera sur la base de ces évaluations nationales avec des possibilités d’ajustement par les professeur·es en début d’année puis à chaque trimestre. Cette décision pose de nombreuses difficultés pratiques et impose une programmation trimestrielle de l’enseignement. Pour l’entrée en 6e, les professeur·es des écoles sollicité·es pour trier les élèves par groupes de niveau.

SUD éducation a redit son opposition à ces évaluations nationales, qui fournissent à moindre coût des indicateurs chiffrés dont le ministère raffole mais qui n’ont aucun sens pédagogique.

 

Adaptation des parcours : l’objectif du ministère est de renforcer le volume horaire des savoirs fondamentaux (français et mathématiques) pour les élèves en difficulté. Pour cela, la piste privilégiée est de diminuer le volume horaire de la LV2.

 

Correctifs académiques des notes de contrôle continu et aux épreuves terminales ainsi que les consignes académiques : le ministère souhaite y mettre fin. On peut s’inquiéter pour les EPLE dont les résultats sont plus faibles en raison d’un manque de mixité sociale. La baisse des résultats risque d'accélérer la fuite vers le privé.  Une note de service est en cours de finalisation pour préciser le rôle des commissions d’entente.

 

Réforme du brevet : l’obtention du DNB sera nécessaire pour entrer en 2nde. Le ministère souhaite renforcer la valeur du DNB en rééquilibrant la part de contrôle continu et d’épreuves terminales pour passer de 50/50 à 40/60.

 

Prépa lycée pour les élèves qui n’ont pas le DNB : Il s’agit selon le ministère d’un dispositif de préparation à la 2de. Ces classes de prépa-lycée seraient dans les lycées avec des effectifs réduits. On peut toutefois douter des moyens attribués. Les élèves qui n’auraient pas le DNB seront inscrit·es dans la prépa lycée de leur établissement d’affectation.

À l’heure actuelle, parmi les élèves qui n’ont pas leur DNB, un peu moins de 10000 redoublent leur 3e, plusieurs milliers vont en CAP et seul·es entre 40 et 50000 passent en 2de. On peut penser que ces chiffres vont augmenter en raison de la réforme du DNB et de la suppression du correctif académique. A priori tous les lycées ont vocation à héberger une prépa-lycée.

D'ores et déjà, le ministère annonce le fléchage de 150 emplois pour les classes de prépa-lycée pilotes à la rentrée 2024.

 

Labellisation des manuels : le ministère annonce qu’une procédure sera mise en place pour choisir les certificateurs à partir d’un cahier des charges technique puis pour évaluer les manuels et leur remettre ou non le label ministériel. Le ministère indique que la liberté, pour les enseignant·es, de choisir et d’utiliser un manuel ne sera pas remise en cause mais on peut s’attendre à des pressions fortes de la part des inspecteurs et inspectrices voire à l’extension des “expérimentations” de manuel unique comme à Mayotte. On ne sait toujours pas comment les premiers manuels de lecture de CP pourront être labellisés pour la rentrée 2024 alors que les programmes ne sont pas encore écrits.

 

Intelligence Artificielle : le ministère prévoit des établissements d’expérimentation avec un appel à manifestation d’intérêt pour un test du dispositif. Comme SUD éducation a eu l’occasion de la réaffirmer, ce recours à l’intelligence artificielle, qui va mobiliser des ressources importantes, est une aberration écologique à l’heure où la crise climatique oblige à revoir en profondeur nos choix et nos pratiques.