CSA MESR du 30 janvier 2024 – Déclarations liminaires de SUD éducation & SUD Recherche

Déclaration liminaire du CSA MESR

 

Tout d’abord nous aimerions revenir brièvement sur la pseudo démission de Mme la Ministre qui pour Sud éducation et Sud Recherche n’a jamais fait illusion. Les petits arrangements avec le Président Macron sur les sujets concernant les étudiants et étudiantes étrangères, comme le pari sur les travaux du conseil constitutionnel ne masquent pas le fait que Mme la Ministre avait accepté de rester dans un gouvernement qui a fait voter une loi raciste et xénophobe qui déroule le tapis pour l’extrême droite. C’est pourquoi nous avons décliné sa dernière invitation à une bilatérale.

 

Concernant la situation sociale, la crise actuelle dans le monde agricole révèle l’impasse du mode de production capitaliste qui broie les humains et détruit notre environnement. Le modèle de développement ultra-libéral centré sur l'industrie agro-alimentaire et la grande distribution dégagent de grosses marges, accentuent l’inflation et écrasent les agricultrices et agriculteurs, captifs et captives de ce système concurrentiel, qui doivent produire toujours plus pour survivre.

 

Ces questions nous concernent toutes et tous : la production de nourriture et de produits alimentaires est essentielle à nos vies !

 

Mais ce ne sont pas les “normes” nécessaires - et encore insuffisantes - pour les droits des salarié·es, la santé, les conditions de travail ou l’environnement qui doivent diminuer. Les réponses prévues du gouvernement, main dans la main avec la FNSEA, ne font globalement que renforcer la fuite en avant productiviste comme extractiviste, loin des préoccupations sociales et écologistes.

 

Dans l’Éducation et l'Enseignement supérieur, plus de 2 millions de repas sont servis chaque jour. Les pouvoirs publics disposent ainsi d'un levier d'ampleur pour peser sur le revenu des paysan·nes, privilégier la production locale et améliorer la qualité des repas servis.

 

L’urgence, c’est le partage des richesses produites et de pouvoir vivre dignement de son travail. L’urgence c’est de renforcer des services publics au service de toutes et tous. Pendant que les actionnaires du CAC 40 se partagent presque 100 milliards d'euros de dividendes, que le nombre de millionnaires croît et que la richesse des milliardaires explose, de plus en plus de travailleuses et travailleurs se retrouvent dans une situation précaire, face à l’inflation. Nous rappelons également que les femmes ont toujours, en moyenne, des salaires inférieurs de 20% à ceux des hommes.

Les paysan·nes ne sont pas les seul·es à se mobiliser sur la question des rémunérations. Les mobilisations du 1er février dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur et la recherche aborderont notamment sur la question des salaires, mais aussi les conditions de travail.

 

La crise sociale est réelle et profonde. Les syndicats Sud éducation et Sud Recherche avec l’Union syndicale Solidaires appellent, partout où c’est possible à échanger, se regrouper, converger, en restant clair·es sur nos valeurs : l’extrême-droite est l’ennemie des travailleuses et des travailleurs.


 

Explication de vote sur les LDG promotions et carrières :

 

Les lignes directrices de gestions présentées ce jour restent la mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction publique et d’un volet particulièrement critiquable de cette loi qui supprime une grande partie des compétences des commissions administratives paritaires, notamment en matière de suivi collectif des carrières des agentes et des agents, les laissant seul-es face à leur hiérarchie et à l’arbitraire. Ces lignes directrices en matière de promotion ne font que répéter la loi, mais n’apportent pas de solution sur : comment on fluidifie les carrières, sur comment on lève les blocages ; pas de prescription pour apporter de la transparence et permettre aux collègues d’avoir les éléments pour éventuellement recourir contre des décisions injustes qui ne leur seraient pas favorables.

 

Les modifications aux LDG apportées ce jour concernent principalement la mise en œuvre de deux éléments de la réforme des retraites, réforme que nous avons combattue et que nous continuons de dénoncer. Si la possibilité de retraite progressive peut être perçue comme positive, elle n'était dans la loi que pour tenter de faire passer la pilule d'un recul de l’âge de départ dénoncé par une très large majorité de la population. Concernant le deuxième sujet, c’est-à-dire la possibilité offerte aux agent-es de rester jusqu'à 70 ans, nous l'avons déjà dit, nous considérons cette mesure comme extrêmement dangereuse. Nous avons réclamé à plusieurs reprise la mesure de l'impact de la réforme des retraites dans son ensemble (à la fois le recul à 64 ans et l'accélération de la réforme Touraine, mais aussi cette possibilité de partir à 70 ans) sur l'augmentation du glissement vieillesse technicité (on rappelle que ce dernier n'est pas compensé par dans subventions pour charges de service public attribuées aux établissements) et sur les futurs recrutements dans nos établissements. Il nous parait essentiel de refuser cette mesure et a minima d'encadrer fortement le recours à la prolongation à 70 ans. Il faut recruter les collègues plus tôt, ne pas les laisser dans la précarité pendant des années, afin qu'ils et elles puissent atteindre l’âge de départ avec suffisamment de trimestres cotisés. Il faut leur permettre d'avoir des carrières et des rémunérations suffisantes pour qu'ils et elles n'aient pas besoin de rester au-delà de l'âge de départ légal pour avoir une pension décente. Et il faut bien entendu une autre réforme des retraites, qui entre autres supprime les décotes, réduise le nombre de trimestres... Sud recherche et Sud éducation réclament toujours le retour de la retraite à 60 ans, nous ne pouvons donc que rejeter fermement cette possibilité de prolongation jusqu'à 70 ans.

 

 


 

Bilan du Plan National d’Action égalité femme / homme :

 

Merci pour le document, qu'on aurait tout de même aimé plus MESR...

 

Et bravo au Service de l'action administrative et des moyens de pratiquer une écriture non exclusive, comme les syndicats Sud éducation et Sud Recherche le demandent de manière constante... Comme quoi c'est possible !

 

La présentation de ce bilan arrive quelques jours après la publication par le haut conseil à l’égalité du 6ème état des lieux du sexisme en France qui montre que malgré une amélioration de la prise de conscience, le sexisme persiste voire s’aggrave. Le rapport pointe le rôle majeur de l’éducation ; il identifie la famille, l’école et le numérique comme 3 incubateurs inoculant le sexisme. Certains constats résonnent avec notre bilan et doivent nous interpeler : par exemple le fait que 74% des femmes n’ont jamais envisagé de carrière dans les domaines scientifiques ou techniques, ou que plus d’un homme sur 5 de 25-34 ans considère normal d’avoir un salaire supérieur à sa collègue à poste égal.

Et d’ailleurs, où en sont les « assises sur l'attractivité des filières scientifiques annoncées dans le document ? »

 

Voici quelques remarques concernant le bilan du plan d’action égalité :

 

Tout d’abord nous tenons à souligner l’importance des campagnes sur le consentement ; les constats sur les violences sexuelles dans le rapport du HCE sont alarmants et montrent combien ces campagnes sont nécessaires.

 

Concernant les formations des encadrants et encadrantes à l'égalité, nous nous demandons jusqu'à quel grain celles-ci sont déployées. De fait, pour nous la notion d'encadrant-es devrait aller jusqu'à l'encadrement de thèse.

 

Sur l'axe 3 et les inégalités en matière de rémunération : Se limiter à un index qui viserait uniquement à permettre à certaines femmes à atteindre des niveaux de rémunération similaires aux hommes et à ne s'attaquer qu'au plafond de verre serait une erreur. Il ne faut pas oublier le plancher collant, dont on retrouve clairement l'impact dans les tableaux présentés concernant les ITRF avec une proportion de femmes en catégorie C nettement supérieur à celle des hommes alors que c'est l'inverse dans les autres catégories : dans ce plancher collant se cumulent des carrières ralenties, mais aussi des métiers (ou des missions) principalement exercées par les femmes qui sont moins bien valorisées que ceux exercés par les hommes. Et il faut arrêter de considérer ça comme une fatalité, on se doit de changer les choses. Et donc ne pas se limiter à regarder les inégalités salariales par le haut mais bien aussi par le bas.

 

Préciser les éléments constitutifs de la rémunération est utile pour déterminer les différents déterminants des inégalités, mais le problème c'est que l'on a souvent des données qui sont des moyennes et qu'en plus pour ce qui est des montants d'Ifse, ce sont en général des combinaisons de portions de primes dont certaines individualisent et génèrent des inégalités que l'on n'a pas les moyens de différencier (prime informatique, blocs fonctionnels aux CNRS, etc...). Nous espérons que les données et analyses futures permettront de mieux répondre à cette question, car comment agir quand on ne peut identifier clairement les fondements des inégalités et surtout comment agir si la politique en matière de rémunération est entièrement tournée vers l'individualisation qui est en général très défavorable aux femmes, comme le présage la politique de rémunération au mérite annoncée.

 


 

Déclaration sur le Rapport social unique 2021 du MESR :

 

Nous sommes très désappointés par la faiblesse du document. Les précédents bilans sociaux ministériel étaient de bien meilleures factures, et cette dégradation qui arrive au moment où il est question de revoir à la baisse l’arrêté sur la base de donnée sociale est inquiétante. On sait bien qu’il s’agit d’une séance de rattrapage de retard accumulé, mais il ne faudrait pas que ça devienne une habitude de faire un document dont on ne peut pas tirer grand-chose, où les manques sont criants et où la présentation et la qualité des données varient en fonction des services. Ce n’est pas possible de travailler correctement dans ces conditions et c’est sans compter le délai de transmission du document qui ne respecte pas formellement les règles. Ce n’est pourtant pas faute de vous avoir alertés sur cette question.

 

 

Quelques exemples de manques criants : 

 

Concernant les contractuels et contractuelles biatss, à part leur nombre on n’a rien !!! Même pas les éléments de parité, alors qu’ils et elles représentent près de 42% des effectifs de biatss et on sait bien qu’en général le taux de femmes y est supérieur par rapport aux titulaires. De fait concernant les Biatss il n’y a aucune information sur leur rémunération, leur mobilité, leur formation, etc…

D’autre part, on a toujours été demandeur de données sur les vacataires et là on a carrément aucune info sur les vacataires enseignement. Concernant les vacataires biatss ce sont quand même 144317 personnes - totalement transparentes puisqu’on n’a aucune information les concernant – et qui effectuent l’équivalent de 5628 temps-plein… Un chiffre qui montre à quel niveau critique se situe le manque de recrutement au sein des établissements du ministère.

Concernant les EPST, outre le peu d’information que l’on a concernant les 57560 agent-es de ces établissements, la présentation de données qui inclue parfois les IR parmi les effectifs chercheur-es et parfois pas, rend l’analyse confuse et les comparaisons avec les filières du supérieur quasi impossible.

 

 

Concernant l’évolution des effectifs :

 

Le taux d’encadrement continue de baisser ; depuis 2012 cela constitue une diminution de près de 14% depuis 2012 si l’on ne considère que les emplois d’enseignants et d’enseignantes titulaires, de 13% en y incluant les enseignantes et enseignants contractuels et de 12% si l’on prend les effectifs totaux. Le ministère prévoit-il de s’attaquer vraiment à cette question, en recrutant des titulaires dont le nombre a baissé de près de 2200 depuis 2017 (1500 enseignant-es et 700 biatss). Dans le même temps , le recours aux contractuel-les s’amplifie.

Dans les EPST, la baisse des effectifs de titulaire est de près de 1700 depuis 2017 – soit une baisse 4% - qui se répartissent en env 1300 ingénieur-es et surtout technicien-nes et 400 chercheurs et chercheuses. En fait ces dernières années, ce sont plus de 5% des effectifs d’agent-es de catégorie B et C qui disparaissent des EPST chaque année et le phénomène s’amplifie… comme s’il n’existait plus de mission pour elles et eux dans les laboratoires et les services !

 

Concernant la parité :

 

L’indice d’avantage masculin pour être PR parmi les EC est de 1,63 pour la filière universitaire et de 1,47 pour la filière hospitalo-universitaire. Ces valeurs diminuent, mais il faudrait quand même attendre 2040 pour atteindre une valeur de 1 dans la filière universitaire. Et le maintien d’une différence de part de femmes recrutée en MCF versus PR ne va pas aider. De plus, parmi les professeurs les données montrent bien que l’accès à la classe exceptionnelle est préférentiellement réservé aux hommes, et ce quels que soient les corps de professeurs d’ailleurs.

Du côté des biatss, le plafond de verre est persistant : ainsi l’accès aux corps des ingénieur-es de recherche est très préférentiellement réservé aux hommes : au rythme actuel, l’indice d’avantage masculin de 1,59 ne devrait atteindre la valeur de 1 que dans 90 ans environ ! Et là encore les éléments donnés montrent que les recrutements continuent d’être discriminants : par exemple 54,8% de femmes recrutées en IE versus 40,5% en IR ; à noter qu’il y avait 59,4% femmes candidates aux concours internes IR2 et seulement 40,9% de reçues, l’autocensure régulièrement évoquée n’est donc pas justifiée ici.

 

Concernant les rémunérations :

 

Quel que soient leur statut les enseignants sont toujours mieux rémunérés que les enseignantes : +324€ en moyenne pour les EC titulaires, + 305€ pour les enseignants des 1er et 2nd degrés affectés dans le supérieur + 128€ pour les enseignants-chercheurs contractuels. Les données ne sont hélas pas assez détaillées pour identifier les déterminants de ces discriminations salariales.

Dans les EPST aussi les hommes sont mieux payés que les femmes (13% de plus) mais la faiblesse des informations données ne permet pas d’analyser ce chiffre.

On se doute bien qu’il sera de même pour les biatss mais comme on l’a dit on n’a aucune information au sujet de leur rémunération dans ce RSU !

 

Pour finir nous aurions une petite question concernant les départs : Il est indiqué 129 départs pour « autres motifs » qu’est-ce que cela signifie ? Si l’on compile démission et rupture conventionnelle ça fait près de 8% des départs définitifs hors décès, ce qui est loin d’être négligeable, et devrait peut-être interroger sur la qualité des conditions de travail de nos collègues.