Contre l’université néolibérale rêvée d’E. Macron

Dans une interview donnée au Youtubeur Hugo Travers le 4 septembre dernier,  E. Macron a présenté quelques axes programmatiques qu’il souhaite mettre en avant pour l’université.

1/ La rentabilité : « ce n’est pas un problème de moyens, avec les moyens qu’on met on doit faire beaucoup mieux » (E. Macron)
La dotation ministérielle allouée aux universités serait donc suffisante. Suffisante pour faire quoi ? Rénover les bâtiments vétustes et mettre enfin aux normes PMR les accès aux salles de classe, désamianter, refaire l’électricité, embaucher les personnels techniques, administratifs, enseignants et chercheurs nécessaires à l’encadrement des étudiant·es, payer le chauffage, agrandir les universités trop petites ? Pourtant la ministre de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, affirme qu’il va falloir puiser dans les fonds de roulement, se serrer la ceinture, car les mesures salariales annoncées (prime « pouvoir d’achat », revalorisation des grilles indiciaires en janvier) ne seront pas prises en compte dans les enveloppes ministérielles (conférence du 1er septembre 2023 lors de la clôture de « France Universités » (ex-CPU))[2]. Donc moins de recrutements (dès septembre, l’UPEC a par exemple annoncé un gel de 80 à 100% des recrutements en 2023-2024).
 
2/ L'individualisation de l'accès aux services publics.  E. Macron propose de faire « davantage contribuer ceux qui ont le plus de moyens »
E. Macron propose de faire payer très cher les étudiant·es très riches. 
D'abord, on est loin d'une politique qui serait appliquée nationalement : E. Macron ne taxe pas très haut les millionnaires et milliardaires français ! Ensuite, E. Macron parle des « fils de milliardaires américains, africains, asiatiques » qui doivent payer, ce qui ne représente pas la majorité des étudiant·es. Surtout, cette idée de différencier les frais d'inscription universitaires au regard de l'origine sociale des étudiant·es est dangereuse pour le service public d'éducation, car cela nourrit l'idéologie de l'éducation comme investissement économique individuel. Tout service public doit être gratuit. C'est par l'impôt que l'Etat doit financer le service public d'éducation : un impôt progressif que les riches payent davantage.
L'autonomie budgétaire des universités est d'ailleurs au cœur de cet enjeu : les fils et filles de milliardaires se regroupent dans certains établissements qui bénéficieraient une fois de plus de ressources supplémentaires...
 
3/ Le leitmotiv de la professionnalisation : « développer des formations plus courtes, plus qualifiantes et au plus près du terrain »
Les formations ne peuvent être seulement le décalque de "besoins du terrain" qui, pour E. Macron, renvoient aux besoins des entreprises dans une perspective de marché des diplômes. Ces besoins du marché de l'emploi sont par définition toujours décalés par rapport à la temporalité de l'enseignement pour une génération. Si l'université doit répondre à des besoins, c'est à ceux qui s'inscrivent dans la vie quotidienne de ses publics. Peut-on vraiment s'en remettre, sur cette question des besoins, à un président qui a fait passer au 49.3 le décalage de l'âge de départ à la retraite, sans écouter le rejet massif exprimé par la population ? Contre la vision utilitariste et néolibérale de la formation, construisons une université critique et émancipatrice qui réponde aux besoins des populations !

Une politique en faveur de l'enseignement supérieur et la recherche s'attaquerait aux problèmes véritables  :
-       Les conditions d’études déplorables (TD surchargés, locaux vétustes)
-       La situation financière des étudiant-es et de leur famille (inflation et pauvreté accrue)
-       De moins en moins de débouchés dans la fonction publique. 
-       Les aides gouvernementales aux formations privées qui déséquilibrent l’offre d’études supérieures au détriment du public et des étudiant·es qui s'endettent.
[1] Lire la dépêche AFP n°698571