Soutien à Kai Terada, contre la répression anti-syndicale dans l’Éducation nationale- Tribune

Dimanche 4 septembre, Kai Terada, professeur de mathématiques au lycée Joliot-Curie de Nanterre depuis 16 ans, a reçu du rectorat une notification de suspension de 4 mois, sans motif. Jeudi 8 septembre, il était convoqué au rectorat de Versailles. Son dossier administratif, qu’il a pu consulter au cours de l’entretien, était toujours vide. Au cours de l’entretien, le directeur des ressources humaines lui indiquait qu’aucune faute grave ne lui était reprochée, mais qu’il ferait vraisemblablement l’objet d’une procédure de « mutation dans l’intérêt du service » sous 10 ou 15 jours, dans l’objectif de « ramener la sérénité dans l’établissement ». Lorsque ses défenseurs syndicaux faisaient remarquer que c’était contraire à tous les principes de droit de la défense, le secrétaire général se contentait d’indiquer que ce n’était pas très grave, et que la jurisprudence était de son côté.

Kai Terada n’a pas été choisi au hasard par l'administration, pas plus que le lycée Jolliot-Curie. Le lycée est un bastion syndical, en première ligne des mobilisations sociales depuis des années. Kai est une figure reconnue du militantisme enseignant au niveau local, régional et national. Il est l’un des responsables de SUD éducation, syndicat très régulièrement visé par le ministère, dans les Hauts-de-Seine. Il a animé un nombre important de grèves dans son établissement et sa ville, est une figure des Assemblées générales de gréviste au niveau de l’Île-de-France, et est reconnu pour le rôle important qu’il a joué dans la mobilisation du collectif Touche pas ma ZEP en 2016. Enfin, il est très actif dans les réseaux de soutien aux jeunes sans-papier, en particulier via RESF. Bien évidemment, c’est le militant syndicaliste qui est visé dans cette décision de l’administration. Ses collègues le soulignent : accuser Kai de contribuer au « manque de sérénité » de l’établissement est une pure vue de l’esprit, d’une mauvaise foi sans nom. Ils et elles étaient d’ailleurs nombreux·ses en grève dès le 5 septembre et rassemblé·es devant le rectorat de Versailles jeudi 8 septembre pour le soutenir.

Avec la procédure de « mutations dans l’intérêt du service », la hiérarchie administrative a trouvé un bon filon. Celle-ci a été largement facilitée par la loi de transformation de la Fonction publique de 2018, en supprimant l’obligation de présenter cette mesure devant les commissions paritaires compétentes. Elle est dorénavant purement et simplement le fait du prince, qui n’a aucune obligation de les justifier : le cynisme avancé par le rectorat de Versailles lors de la convocation de Kai en est bien l’illustration. Ce n’est pas la première fois que l’administration utilise cette procédure, depuis l’affaire du collège République (Bobigny, 93) en 2019. Depuis lors, l’argumentaire de l’administration est toujours le même : il s’agit de « ramener la sérénité dans l’établissement », au mépris de toute réalité. Les cibles sont toujours les mêmes également : des syndicalistes, des enseignant·es engagé·es dans leurs pratiques pédagogiques ou associatives. L’intérêt du service, dans ces conditions, n’est jamais celui des élèves, mais celui de la hiérarchie, qui peut ainsi se débarrasser à peu de frais de personnes vigilantes prêtes à pointer du doigt toutes ses dérives.

La répression anti-syndicale dans l’éducation a pris sous Blanquer une ampleur inédite, notamment contre les personnels qui ont contesté en 2019 la mise en place du nouveau baccalauréat. Elle se poursuit donc sous Ndiaye. Le mode opératoire devient toujours plus kafkaïen. Il est temps que cela cesse.

Nous, personnalités du monde syndical, politique, de l’éducation et de la culture nous engageons auprès de Kai et des victimes de la répression anti-syndicale dans l’éducation. Nous appelons, avec l’intersyndicale nationale de l’éducation, à participer à un rassemblement devant le ministère de l’Éducation nationale le mercredi 21 septembre à 15h, pour réclamer l’abandon des poursuites contre Kai, et l’annulation de toutes les décisions prises à l’encontre de tou·tes les syndicalistes réprimé·es ces dernières années.

Signataires :

Syndicalistes :

Coralie Benech, co secrétaire générale du SNEP-FSU
Elvis Bruneaux, co-secrétaire départemental de SUD éducation 92
Marie Buisson, secrétaire générale de la FERC-CGT
Colin Champion, président de la Voix lycéenne
Christophe Delecourt, co-secrétaire général de l'UFSE-CGT
Patrick Désiré, secrétaire national de l'UFSE-CGT
Simon Duteil, co-délégué général de l’Union syndicale Solidaires
Alissa Fouquet, secrétaire fédérale de Solidaires étudiant·es
Sigrid Gérardin, co-secrétaire générale du SNUEP-FSU
Leny Gras, co-secrétaire général du Mouvement national lycéen
Murielle Guilbert, co-déléguée générale de l’Union syndicale Solidaires
Adeline Le Guennec, co-secrétaire départementale de SUD éducation 92
Gwenaël Le Paih, secrétaire général adjoint du SNES-FSU
Michaël Marcilloux, co-secrétaire général de la CGT Éduc'action
Gaëlle Martinez, déléguée générale de Solidaires Fonction publique
Frédéric Moreau, co-secrétaire général de la CGT Éduc'action Versailles
Imane Ouelhadj, présidente de l’UNEF
Marian Petitfils, co secrétaire départemental SNES-FSU 92
Maxime Pouvreau, secrétaire général de la CGT Éduc'action 92
Emmanuel Séchet, secrétaire général adjoint du SNES-FSU
Fatna Seghrouchni, co-secrétaire fédérale de SUD éducation
Jules Siran, co-secrétaire fédéral de SUD éducation
Benoît Teste, secrétaire général de la FSU
Antoine Tardy, secrétaire académique SNES-FSU Versailles
Laurène Thibault, co secrétaire départementale SNES-FSU 92
Maud Valegeas, co-secrétaire fédérale de SUD éducation, représentante en CSE
Charlotte Vanbesien, secrétaire générale adjointe de la FERC-CGT
Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU
Céline Verzeletti, co-secrétaire générale de l'UFSE-CGT
Isabelle Vuillet, co-secrétaire générale de la CGT Éduc'action

Personnalités politiques :

Ségolène Amiot, députée LFI-Nupes de Loire-Atlantique
Rodrigo Arenas, député LFI-Nupes de Paris
Nathalie Arthaud, porte-parole de Lutte ouvrière
Olivier Besancenot, porte-parole du NPA
Idir Boumertit, député LFI-Nupes du Rhône
Alexis Corbière député LFI-Nupes  de Seine-Saint-Denis
Hendrik Davi, député LFI-Nupes des Bouches-du-Rhône
Elsa Faucillon, député GDR-Nupes des Hauts-de-Seine
Charles Fournier, député groupe écologiste-Nupes d’Indres-et-Loire
Jérôme Legavre député LFI-Nupes de Seine-Saint-Denis
Sarah Legrain députée LFI-Nupes de Paris
Mathilde Panot députée LFI-Nupes  du Val-de-Marne
Francesca Pasquini, députée des Hauts-de-Seine, groupe écologiste-NUPES
Stéphane Peu, député GDR-Nupes de Seine-Saint-Denis
Sébastien Peytavie, député du groupe écologiste-Nupes de Dordogne
Christine Poupin, porte-parole du NPA
Philippe Poutou, porte-parole du NPA
Jean-Claude Raux, député groupe écologiste-Nupes de Loire-Atlantique
Sabrina Sebaihi, députée groupe écologiste-Nupes
Aurélien Saintoul, député LFI-Nupes des Hauts-de-Seine
Paul Vannier, député-LFI Nupes du Val-d'Oise
Léo Walter, député LFI-Nupes des Alpes-de-Haute-Provence

Personnalité de l’éducation et de la culture :

Joseph Andras, écrivain
Etienne Balibar, philosophe
Ludivine Bantigny, historienne
Nageate Bellahcen, co-présidente de la FCPE
Arno Bertina, écrivain
Laurent Binet, écrivain
Carla Dugault, co-présidente de la FCPE
Catherine Chabrun, enseignante retraitée, pédagogie Freinet
Grégory Chambat, syndicaliste et pédagogue
Véronique Decker, enseignante retraitée
Laurence de Cock, historienne et enseignante
Annie Ernaux, écrivaine
Kaoutar Harchi, écrivaine et sociologue
Mathilde Larrère, historienne
Christian Laval, sociologue
Sandra Lucbert, écrivaine
Philippe Merieu, pédagogue
Irène Pereira, IRESMO
Fabrice Riceputi, historien
Patrick Silberstein, médecin et éditeur
Philippe Watrelot, pédagogue
Rachid Zerrouki, professeur et auteur

Sur Médiapart : https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/160922/soutien-kai-terada-contre-la-repression-anti-syndicale-dans-l-education-nationale

Sur Regards.fr : http://www.regards.fr/tribunes/article/tribune-soutien-a-kai-terada-contre-la-repression-anti-syndicale-dans-l