Pour une école réellement inclusive

  1. Constat

Plus de quinze ans après l’a­dop­tion de la loi de 2005, il est temps d’en tirer un pre­mier bilan. Si SUD édu­ca­tion salue la volon­té d’ou­vrir l’é­cole à toutes et tous les élèves, la com­mu­ni­ca­tion minis­té­rielle actuelle, qui pré­tend que l’ob­jec­tif de la loi est atteint, appa­raît comme une mys­ti­fi­ca­tion de plus, et même comme un men­songe à dénon­cer. Des mil­liers d’é­lèves sont chaque année sans solu­tion de sco­la­ri­sa­tion, alors même que Blanquer a pré­ten­du à l’oc­ca­sion du quin­zième anni­ver­saire de la loi qu’aucun⋅e élève ne res­te­rait sans solu­tion. Parmi celles et ceux qui béné­fi­cient de noti­fi­ca­tions MDPH, ce ne sont par­fois que quelques heures heb­do­ma­daires qui sont octroyées. Contrairement aux pro­messes des PIAL, en cas d’ab­sence de l’AESH, les élèves res­tent sans accompagnement.

Les condi­tions de tra­vail, les contrats et la rému­né­ra­tion des AESH sont tou­jours aus­si scan­da­leuses, alors que le minis­tère pré­tend régu­liè­re­ment mettre en œuvre des avan­cées : contrats à temps par­tiels impo­sés, rému­né­ra­tion géné­ra­le­ment au SMIC mal­gré des grilles indi­ciaires dis­pa­rates d’une aca­dé­mie à l’autre, pré­ca­ri­té contrac­tuelle… Les simu­lacres d’a­van­cée, notam­ment en ce qui concerne les grilles ou la durée de 3 ans des contrats, cor­res­pondent en réa­li­té à la nor­ma­li­sa­tion de la pré­ca­ri­té vou­lue dans la loi de trans­for­ma­tion de la Fonction publique. Cela ancre tou­jours plus le métier d’AESH dans la rela­tion contrac­tuelle et l’é­loigne de ce que ce devrait être, à savoir un emploi sta­tu­taire. Ces dif­fé­rences de sta­tut avec les enseignant·es, entraîne des dis­pa­ri­tés de condi­tions de tra­vail, qui ont des effets sur l’accueil des élèves.Il nous appa­raît fon­da­men­tal que le syn­di­cat veille à por­ter le ques­tion­ne­ment autour des enjeux de pou­voir et de la hié­rar­chie impli­cite que cela engendre. Dans une dyna­mique de conscience de classe, nous devons reques­tion­ner la place des enseignant·es en terme de domi­na­tion, afin de repen­ser la proxi­mi­té avec les col­lègues AESH.

Ces dernièr·es, ne sont en temps nor­mal pas res­pon­sables des enfants, en l’absence des enseignant·es. Exigeons un sta­tut de res­pon­sa­bi­li­té pour tou·tes avec l’instauration d’un sta­tut d’éducateur·trice sco­laire spécialisé·e, pour aller plus loin des consi­dé­ra­tions financières.

La for­ma­tion ini­tiale et conti­nue des enseignant·es est tou­jours très insuf­fi­sante. Quasiment aucun temps de for­ma­tion n’est pré­vu dans le cadre des Master MEEF concer­nant la prise en charge des élèves en grande dif­fi­cul­té ou rele­vant du champ du han­di­cap. Pour les enseignant·es spécialisé·es, le pas­sage au CAPPEI a repré­sen­té une perte de qua­li­fi­ca­tion, avec en par­ti­cu­lier une baisse du nombre d’heures de for­ma­tion. SUD édu­ca­tion dénonce éga­le­ment le fait que la for­ma­tion CAPPEI a dis­pa­ru dans cer­tains dépar­te­ments, ce qui impose aux candidat·es de se pré­pa­rer seul·es (pas­sage en « candidat·e libre »)à une cer­ti­fi­ca­tion qui néces­site pour­tant l’ac­qui­si­tion de com­pé­tences et de connais­sances très poin­tues. Pour les enseignant·es dit·es sans spé­cia­li­té qui accueillent des élèves à besoins par­ti­cu­liers, aucun temps d’é­change ou de co-for­ma­tion n’est pré­vu, pas plus qu’un temps de pré­pa­ra­tion des cours lié aux adap­ta­tions des docu­ments par exemple. Les for­ma­tions ins­ti­tu­tion­nelles dans le cadre de la for­ma­tion conti­nue sont insuf­fi­santes. Et, pour les enseignant·es du secon­daire, la dimi­nu­tion des DHG contraint par­fois leur éta­blis­se­ment à choi­sir de stop­per l’in­ter­ven­tion d’enseignant·es titu­laires d’un CAPPEI auprès des élèves des classes ULIS. Les béné­fices de for­ma­tions déjà amoin­dries sont alors de fait encore plus limités.

De ce fait, l’in­clu­sion est par­fois juste un mot vide de sens car le pla­ce­ment phy­sique à l’intérieur d’un même lieu, la classe dite ordi­naire, ne signi­fie pas for­cé­ment inclu­sion au sens ori­gi­nel du terme (adap­ta­tion du milieu aux besoins spé­ci­fiques de l’é­lève). Des enfants peuvent, faute d’ac­com­pa­gne­ment, faute de for­ma­tion, faute de moyens (effec­tifs allé­gés, maté­riel adap­té…) se retrou­ver dans un espace d’ex­clu­sion interne à l’intérieur d’une classe ordi­naire, par exemple, ne pas par­ti­ci­per aux acti­vi­tés com­munes. Ce sont les « exclus de l’intérieur ».

C’est pour­quoi pour SUD édu­ca­tion, l’inclusion pour être plei­ne­ment effec­tive doit être tota­le­ment repen­sée et avec elle l’École dans son ensemble. Car l’inclusion sco­laire invite à la baisse les effec­tifs des classes afin de per­mettre une réelle dif­fé­ren­cia­tion et la mise en place de péda­go­gies coopé­ra­tives. L’accompagnement des élèves en situa­tion de han­di­cap peut et doit aus­si se faire par les pairs afin de favo­ri­ser aus­si à terme une inclu­sion sociale et non seule­ment scolaire.

L’inclusion invite à repen­ser l’organisation du temps et de l’espace sco­laire, les pro­grammes et les éva­lua­tions. Elle invite à repen­ser l’organisation des équipes, les temps de concer­ta­tion, de for­ma­tion des per­son­nels. Enfin, elle invite à repen­ser l’école au-delà de la seule visée de l’insertion pro­fes­sion­nelle et de la recen­trer sur les enjeux de coopé­ra­tion et d’émancipation au béné­fice de tou·tes les enfants comme des adultes.

Les PIAL, mis en place à la ren­trée 2019, sont un exemple de la poli­tique du gou­ver­ne­ment. En vitrine, une avan­cée pour les per­son­nels et les élèves avec des moyens sup­plé­men­taires ( ortho­pho­niste, ergo­thé­ra­peute ) et une meilleure ges­tion des per­son­nels, en réa­li­té c’est un dis­po­si­tif qui accroît encore la flexi­bi­li­té des contrats des AESH. Ils·elles peuvent être nommé·es sur des zones géo­gra­phiques éten­dues pour un nombre réduit d’heures et dans plu­sieurs éta­blis­se­ments. Ces dépla­ce­ments accroissent encore la pré­ca­ri­té. Ces per­son­nels sont nom­més auprès d’é­lèves d’âges variés, scolarisé·es de la mater­nelle au lycée et pré­sen­tant des situa­tions de han­di­cap tota­le­ment dif­fé­rentes allant de la dys­lexie au han­di­cap moteur en pas­sant par l’au­tisme. Ils·elles doivent faire face à des situa­tions ren­dues d’au­tant plus dif­fi­ciles de par leur diver­si­té et ce, sans formation.Les AESH peuvent être licencié·es s’ils ou elles refusent d’in­té­grer un PIAL ou de chan­ger d’é­cole d’affectation…

Les éta­blis­se­ments et dis­po­si­tifs spé­cia­li­sés (IME, ITEP, IMPRO, SESSAD, hôpi­taux de jour) font les frais d’une poli­tique d’in­clu­sion qui se fait à moyens constants. Or, par­fois, l’in­clu­sion à tout prix met les élèves, les per­son­nels et les parents dans une situa­tion de grande souf­france, et les éta­blis­se­ments médi­co-sociaux repré­sentent la meilleure solu­tion : leur déman­tè­le­ment géné­ra­li­sé est de ce point de vue inac­cep­table. Ces éta­blis­se­ments médi­co-sociaux doivent pou­voir conti­nuer à accueillir des enseignant·es spécialisé·es, et SUD édu­ca­tion n’ac­cepte pas la bas­cule de plus en plus fré­quente et sans réflexion de leurs postes vers des postes ULIS. Au contraire, ces éta­blis­se­ments doivent béné­fi­cier de moyens sup­plé­men­taires, notam­ment en postes fixes d’enseignant·es.

Le manque de moyens alloués au RASED et leur dis­pa­ri­tion pro­gram­mée empêchent une réelle prise en charge de la grande dif­fi­cul­té sco­laire. Ce qui a pour consé­quence, entre autres, d’aggraver la situa­tion de nombreux·ses élèves et de pro­vo­quer par­fois un glis­se­ment vers le champ du han­di­cap, avec ou sans aide.

Les moyens RASED devraient pou­voir exis­ter aux côtés de l’in­clu­sion sans cet effet de glis­se­ment, qui ne per­met pas une iden­ti­fi­ca­tion réelle des besoins et conduit à des pro­ces­sus d’orientation par­fois erro­nés. Par exemple, l’in­clu­sion à marche for­cée d’é­lèves non scolarisé·es anté­rieu­re­ment et non lecteurs·trices sans moyens consé­quents d’ac­com­pa­gne­ment (UPE2A à effec­tifs limi­tés) est de plus en plus sou­vent com­pen­sée par une prise en charge par les RASED. Dans un contexte où leurs moyens sont en constante dimi­nu­tion cela pèse sur la prise en charge de tou·tes les élèves qui ont des difficultés.

A l’université, l’accompagnement des étudiant·es en situa­tion de han­di­cap (ESH) relève de quelques per­son­nels ou enseignant·es référent·es alors qu’il devrait être pris en charge col­lec­ti­ve­ment. La ques­tion du han­di­cap étant une ques­tion sociale et non pure­ment médi­cale, elle ne peut pas être du seul res­sort des Services de Santé mais doit faire l’objet de dis­cus­sions col­lec­tives régu­lières, de prises en charge par l’ensemble de la com­mu­nau­té uni­ver­si­taire : étudiant·es, per­son­nels de san­té et sociaux, EC…

Pour une réelle poli­tique inclu­sive, il faut que des heures soient déga­gées à des enseignant·es pour assu­rer une réelle prise en compte des ESH dans leurs for­ma­tions. Les ser­vices de san­té (méde­cins, infirmiers·ères, psy­cho­logues…) et les pôles han­di­caps sont sous-dotés et, dans ces der­niers, la for­ma­tion à l’ac­com­pa­gne­ment est trop sou­vent mise de côté.

La prise en charge des ESH ne peut se résu­mer à mettre en place quelques accès PMR ou par l’octroi d’un 1/​3 temps trop auto­ma­tique, mais à l’inclusion dans tous les aspects des études et de la vie uni­ver­si­taire des ESH.

Les uni­ver­si­tés sont par ailleurs très loin d’embaucher 6% de per­son­nels en situa­tion de han­di­cap comme la loi l’oblige. Comment une uni­ver­si­té qui ne sous­crit pas à ses obli­ga­tions d’inclusion peut-elle mener une réelle poli­tique envers les ESH ?

  1. Revendications – SUD édu­ca­tion reven­dique pour les élèves et les familles :

Pour SUD édu­ca­tion, l’in­clu­sion doit ces­ser d’être un men­songe ser­vi aux élèves et à leurs familles :

- chaque élève doit avoir une solu­tion de sco­la­ri­sa­tion adap­tée qui ne soit pas moti­vée par des contraintes bud­gé­taires ou par les dis­po­si­tifs disponibles,

- chaque élève doit pou­voir être suivi·e et pris·e en charge, autant que néces­saire, par les per­son­nels spé­cia­li­sés du RASED et cela tout au long de sa scolarité

- les familles doivent pou­voir être accom­pa­gnées sur le plan médi­co-social, ce qui néces­site des créa­tions de postes d’assistant·es de ser­vice social, d’infirmier·es et de méde­cins sco­laires en nombre suffisants.

- dans les classes, la double ins­crip­tion dans les dis­po­si­tifs et les classes d’o­ri­gine doit être sys­té­ma­ti­que­ment res­pec­tée (dans le cadre d’une baisse géné­ra­li­sée des effec­tifs dans les classes)

- recon­nais­sance par les col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales des élèves scolarisé·es en EMS, en par­ti­cu­lier pour les aides attri­buées par les col­lec­ti­vi­tés (CD, com­munes, régions…).

Au-delà de l’é­cole, c’est bien l’en­semble du ser­vice public de san­té et médi­co-social qui est doit être ren­for­cé dans tous les ter­ri­toires, avec une offre de soin per­met­tant à tou·tes les élèves d’être pris en charge correctement.

SUD édu­ca­tion porte une série de mesure pour amé­lio­rer les condi­tions de tra­vail des élèves et par consé­quent les condi­tions d’accompagnement des élèves en situa­tion de handicap :

- la créa­tion d’un véri­table sta­tut de fonc­tion­naire d’Éducateur·trice Scolaire Spécialisé·e pour les AESH afin de recon­naître leur rôle d’éducatif et leur métier,

- un salaire à l’en­trée dans le métier : 1700€ nets (confor­mé­ment aux reven­di­ca­tions de l’Union syn­di­cale Solidaires pour le SMIC) et l’accès aux mêmes primes (édu­ca­tion prio­ri­taire), indem­ni­tés et pon­dé­ra­tions (édu­ca­tion prio­ri­taire et affec­ta­tion mul­tiple) que les titu­laires quelle que soit la durée du contrat,

- un temps plein avec 24h max avec élèves et le reste pour la prise en compte de tout le tra­vail invi­sible (pré­pa­ra­tion, sui­vi, coor­di­na­tion, formation…)

- l’ar­rêt des PIAL

- des moyens pour une véri­table for­ma­tion ini­tiale et conti­nue adap­tée aux spé­ci­fi­ci­tés des dif­fé­rents han­di­caps ren­con­trés dans les écoles

- des affec­ta­tions res­pec­tueuses des élèves et des per­son­nels : affec­ta­tion sur 2 éta­blis­se­ments au maxi­mum, res­pect des noti­fi­ca­tions MDPH… de se dis­po­ser toute entiè­re­ment à l’accueil des besoins des élèves ?

SUD édu­ca­tion reven­dique pour les enseignant·es :

- pour les enseignant·es sans spé­cia­li­té, il faut du temps de co-for­ma­tion, du temps de concer­ta­tion, du temps dédié aux ren­contres et régu­la­tions avec les familles et les différent·es professionnel·les inter­ve­nant autour de l’élève, afin d’accueillir et accom­pa­gner effi­ca­ce­ment tous les élèves, quel que soit leur profil.

- un bud­get com­mande aug­men­té pour le maté­riel péda­go­gique de la classe (ain­si qu’une prise en compte de nombre de pho­to­co­pies allouées), une limi­ta­tion du nombre d’é­lèves dans la classe

- une prise en compte des besoins par­ti­cu­liers dans la for­ma­tion ini­tiale de l’en­semble des enseignant·es, et une dis­po­ni­bi­li­té accrue de la for­ma­tion conti­nue sur temps de travail

- l’intégration des éta­blis­se­ments médi­co-sociaux (IME, ITEP) aux réseaux d’é­du­ca­tion prio­ri­taire, avec attri­bu­tion des primes et condi­tions sta­tu­taires correspondantes.

Dans l’Enseignement supé­rieur, SUD édu­ca­tion revendique :

  • le recru­te­ment consé­quent et la for­ma­tion de per­son­nels au sein des ser­vices de méde­cine pré­ven­tive et des struc­tures handicap
  • des dota­tions horaires et une for­ma­tion pour les EC assu­rant le sui­vi des ESH
  • une réflexion et prise en charge col­lec­tive des ESH par l’ensemble de la com­mu­nau­té universitaire
  • l’obligation pour les uni­ver­si­tés d’employer 6% de per­son­nels en situa­tion de handicap.

  1. L’intervention de SUD éducation

Les AESH sont aujourd’­hui autour de 129 000 dans l’Éducation natio­nale, et leur nombre va inévi­ta­ble­ment aller crois­sant. Pourtant, leur rému­né­ra­tion, leurs condi­tions de tra­vail et leurs droits sont tou­jours aus­si indi­gents. De ce fait, ils et elles s’or­ga­nisent de plus en plus afin de faire valoir leurs droits. SUD édu­ca­tion est ain­si très pré­sent dans un nombre impor­tant de col­lec­tifs AESH, et a été à l’i­ni­tia­tive de mobi­li­sa­tions dans un cer­tain nombre de départements.

Pourtant, la visi­bi­li­té de SUD édu­ca­tion auprès des AESH au niveau est encore trop fra­gile au niveau natio­nal, et il s’a­git de la renforcer.

SUD édu­ca­tion fait de la syn­di­ca­li­sa­tion des AESH une prio­ri­té. Cela implique d’a­mé­lio­rer notre com­mu­ni­ca­tion auprès des AESH (envois Ostic, tour­nées, maté­riel spé­ci­fique, réseaux sociaux).

La for­ma­tion syn­di­cale est éga­le­ment un enjeu impor­tant pour faire res­pec­ter les droits des per­son­nels AESH.

SUD édu­ca­tion se mon­tre­ra par­ti­cu­liè­re­ment volon­ta­riste dans les luttes des AESH et plus lar­ge­ment autour de l’in­clu­sion. SUD édu­ca­tion conti­nue­ra à se pré­sen­ter comme favo­rable à l’in­clu­sion auprès des per­son­nels. SUD édu­ca­tion pour­suit son impli­ca­tion dans les col­lec­tifs de défense des pré­caires. SUD édu­ca­tion conti­nue­ra à por­ter dans l’in­ter­syn­di­cale natio­nale ses man­dats d’i­ni­tia­tives concer­nant l’in­clu­sion et les AESH.


Stratégie syndicale

SUD édu­ca­tion a pour fon­de­ment la construc­tion d’un syn­di­ca­lisme de trans­for­ma­tion sociale, anti­ca­pi­ta­liste, éco­lo­giste, fémi­niste, anti­fas­ciste, anti­ra­ciste et autogestionnaire.

L’Éducation natio­nale et l’ESR regroupent des per­son­nels aux sta­tuts divers : des fonc­tion­naires d’État mais aus­si un nombre gran­dis­sant de pré­caires et de contractuel·les, embauché·es direc­te­ment par les rec­to­rats ou les éta­blis­se­ments d’enseignement supé­rieur et orga­nismes de recherche.

Pour deve­nir un outil de lutte effi­cace, attrac­tif et gagner de nou­veaux et nou­velles adhérent⋅es, notre syn­di­ca­lisme doit s’adresser à tou·tes, en favo­ri­sant l’autogestion, la lutte de classe et la pra­tique du rap­port de force.

Enfin, nous sommes convaincu·es qu’il faut dépas­ser les reven­di­ca­tions cor­po­ra­tistes en déve­lop­pant un syn­di­ca­lisme inter­pro­fes­sion­nel à tra­vers l’Union syn­di­cale Solidaires.

1- 25 ans après : un bilan

Nous avons connu des pro­grès constants jusqu’en 2014, en termes d’adhésions et de résul­tats élec­to­raux. Depuis, les élec­tions pro­fes­sion­nelles de 2018 ont été une défaite. Si nous avons conser­vé notre siège au CTMESRI, nous n’avons pas récu­pé­ré le siège en CTMEN que nous avions per­du en 2014, ce qui nous coûte au quo­ti­dien la moi­tié de nos décharges dans l’Éducation natio­nale et affai­blit notre repré­sen­ta­ti­vi­té. Nombre de nos syn­di­cats ont per­du des sièges dans les ins­tances locales. Plus glo­ba­le­ment, ce recul s’inscrit dans une phase des­cen­dante du syn­di­ca­lisme (déclin de l’engagement syn­di­cal, échec des mobi­li­sa­tions, pré­ca­ri­sa­tion de la socié­té, ren­for­ce­ment du for­ma­tage idéo­lo­gique…). Pourtant notre nombre d’adhérent·es est en hausse depuis le der­nier congrès. Nous consta­tons le lien fort qui existe entre adhé­sions et résul­tats élec­to­raux. Ces der­niers illus­trent aus­si la dis­pa­ri­té de notre implan­ta­tion fédé­rale. Par ailleurs, le mode de scru­tin élec­tro­nique par­ti­cu­liè­re­ment abs­cons ain­si que l’o­pa­ci­té du dépouille­ment n’ont vrai­sem­bla­ble­ment pas favo­ri­sé la par­ti­ci­pa­tion et rendent les ana­lyses de vote difficiles.

2- Développer notre syndicalisme

La stag­na­tion de SUD édu­ca­tion n’est bien sûr pas une fata­li­té et nous pou­vons déve­lop­per notre implan­ta­tion en met­tant en œuvre avec volon­ta­risme notre « double besogne » syn­di­cale : défendre les reven­di­ca­tions immé­diates des travailleur·euses, lut­ter pour une trans­for­ma­tion d’ensemble de la socié­té. Cela passe par le déve­lop­pe­ment de nos pra­tiques de ter­rain, par une réflexion sur notre com­mu­ni­ca­tion et par une for­ma­tion constante nous per­met­tant de répondre aux pro­blèmes quo­ti­diens que nous ren­con­trons. Développer l’engagement et la syn­di­ca­li­sa­tion, c’est en pre­mier lieu rendre plus visible nos posi­tions et nos pra­tiques militantes.

Il est donc impor­tant de faci­li­ter l’acte d’adhé­rer et l’en­ga­ge­ment de nou­velles et nou­veaux adhérent·es dans les struc­tures locales pour déve­lop­per un syn­di­ca­lisme de lutte et de masse.

Développer notre syn­di­ca­lisme c’est éga­le­ment ins­crire les luttes de l’éducation dans celles des classes popu­laires pour l’égalité, la jus­tice et la digni­té. Pour SUD édu­ca­tion, cela veut dire avoir clai­re­ment pour axe prio­ri­taire et cen­tral la défense achar­née de ce qu’il y a d’égalitaire et d’émancipateur dans le ser­vice public d’éducation. En ce sens, la construc­tion d’une « pers­pec­tive de classe dans l’éducation » ne peut se limi­ter au tra­vail inter­syn­di­cal, même si celui-ci est pri­mor­dial. Nous devons aus­si por­ter cette exi­gence avec les asso­cia­tions de parents d’élèves, les syn­di­cats de lycéen·nes et d’étudiant·es et les col­lec­tifs péda­go­giques qui peuvent se retrou­ver dans cet ancrage de classe du com­bat pour la défense d’un ser­vice public d’é­du­ca­tion éman­ci­pa­teur et égalitaire.

3- Des outils pour se développer

3 – 1 Construire les luttes par notre syn­di­ca­lisme de terrain :

Notre impli­ca­tion dans les luttes, tant dans notre sec­teur que dans l’interpro, est pri­mor­diale, car c’est là que le rap­port de force se construit, et qu’on confronte nos reven­di­ca­tions et nos pra­tiques aux réa­li­tés du terrain.

Pour les déve­lop­per, il faut aller aux devants des col­lègues, notam­ment en organisant :

- des appels à la grève en prise avec le ter­rain, dis­cu­tés avec les personnels ;

- une impli­ca­tion dans les col­lec­tifs de lutte. Dans l’ESR par exemple, depuis plu­sieurs années et notam­ment lors de la mobi­li­sa­tion contre la LPR, des col­lec­tifs de pré­caires et de « jeunes » (doctorant·es, post-doc, IGR, EC) se sont consti­tués et ont par­fois pris en charge la mobi­li­sa­tion bien plus que les orga­ni­sa­tions syn­di­cales. Nous devons adop­ter une poli­tique syn­di­cale en direc­tion de ces cadres en s’y inves­tis­sant sérieu­se­ment, sans cacher notre appar­te­nance syn­di­cale, en y fai­sant la démons­tra­tion que SUD édu­ca­tion peut être utile aux mobi­li­sa­tions et à l’auto-organisation des collègues.

- des tour­nées d’écoles, d’établissements et de ser­vices, et des RIS/​HMIS ou des AG locales régu­lières pour mobi­li­ser les col­lègues et faire vivre une pré­sence du syn­di­ca­lisme de lutte ;

- une car­to­gra­phie de notre implan­ta­tion mili­tante avec des référent·es d’établissements ou de sec­teurs, en leur envoyant régu­liè­re­ment du maté­riel, en les sol­li­ci­tant pour avoir des infor­ma­tions de terrain ;

- des tables de presse lors des ras­sem­ble­ments militant·es, ou à l’INSPE pour prendre contact avec les futur·es collègues ;

Dans l’ESR, pour dépas­ser une syn­di­ca­li­sa­tion prin­ci­pa­le­ment idéo­lo­gique et faire adhé­rer plus de BIATSS et de pré­caires, nous :

  • ren­for­çons les pro­blé­ma­tiques BIATSS (condi­tions de tra­vail, pres­sion de la hié­rar­chie, évo­lu­tion des car­rières & rému­né­ra­tion…) dans nos expres­sions à des­ti­na­tion des per­son­nels des éta­blis­se­ments d’enseignement supé­rieur et orga­nismes de recherche.
  • ren­for­çons le tra­vail com­mun avec les com­mis­sions pré­ca­ri­té et juri­dique pour qu’elles apportent des armes aux adhérent·es pré­caires et BIATSS.
  • tra­vaillons à éta­blir des ponts entre la pré­ca­ri­té dans l’EN et la pré­ca­ri­té dans l’ESR

3 – 2 Communication

- la dif­fu­sion de nos valeurs et posi­tions à tra­vers nos jour­naux, des tracts, des affiches, des bro­chures, des lettres élec­tro­niques, et nos sites ali­men­tés régulièrement ;

- l’utilisation des divers réseaux sociaux : mal­gré toutes les limites dont nous sommes conscient·es : ce sont des outils de com­mu­ni­ca­tion certes impor­tants mais qui ne doivent pas être une fin en soi. La vidéo est un sup­port à déve­lop­per localement ;

- la com­mu­ni­ca­tion avec les jour­naux alter­na­tifs en ligne et la presse régio­nale pou­vant don­ner une cou­ver­ture média­tique au mou­ve­ment social ;

- La for­ma­tion poli­tique à tra­vers des stages, par exemple sur l’his­toire du syn­di­ca­lisme, du mou­ve­ment ouvrier, du fémi­nisme pour mieux com­prendre la socié­té dans laquelle on vit et pour mieux la combattre.

3 – 3 Formation

- la tenue de stages pour déve­lop­per un pre­mier contact, accueillir les adhérent·es, for­mer syn­di­ca­le­ment les militant·es ;

- la for­ma­tion sur les droits des per­son­nels et sur l’ensemble de nos axes d’intervention pour être en capa­ci­té de répondre aux dif­fi­cul­tés des salarié·es et de défendre nos positions ;

- le déve­lop­pe­ment de sup­ports de for­ma­tion pour tou­cher un maxi­mum adhérent·es (biblio­thèques syn­di­cales, vidéos, brochures…)

- la mise en évi­dence de notre appar­te­nance à l’Union syn­di­cale Solidaires de façon à s’appuyer sur son développement ;

3.4. Des axes d’interventions à (re)développer

Parmi nos orien­ta­tions (lutte contre la pré­ca­ri­té et les dis­cri­mi­na­tions, anti-hié­rar­chie…), cer­taines feront l’objet d’une atten­tion toute par­ti­cu­lière et d’une action fédé­rale volon­ta­riste, car ils sont cen­traux dans l’actualité de notre secteur :

- l’écologie : le contexte de crise cli­ma­tique et éco­lo­gique impose à notre syn­di­cat de prendre sa place dans cette bataille essen­tielle. L’exploitation capi­ta­liste mène à la des­truc­tion des éco­sys­tèmes et met en dan­ger les socié­tés humaines. Nous pou­vons agir vis-à-vis de notre admi­nis­tra­tion et des col­lec­ti­vi­tés qui gèrent les locaux/​travaux, et sur nos ter­ri­toires par le biais des unions locales et de l’u­nion dépar­te­men­tale Solidaires par :

* un enga­ge­ment plus impor­tant dans la pré­pa­ra­tion des grèves cli­ma­tiques, notam­ment celles des jeunes,

* le déve­lop­pe­ment de liens avec les orga­ni­sa­tions éco­lo­giques (en accord avec les valeurs du syndicat),

* du maté­riel de for­ma­tion syn­di­cale et péda­go­gique à des­ti­na­tion des col­lègues, SUD édu­ca­tion man­date la com­mis­sion éco­lo­gie pour :

* tra­vailler nos reven­di­ca­tions pour notre champ pro­fes­sion­nel, en lien avec d’autres tra­vaux enga­gés par notre syndicat,

* pro­po­ser des cam­pagnes fédé­rales à décli­ner localement

* pro­po­ser des for­ma­tions fédé­rales ou en lien avec Solidaires,

- l’antisexisme : dans un sec­teur fémi­ni­sé à 68 %, il y a une néces­si­té à s’adresser spé­ci­fi­que­ment aux per­son­nels en tant que travailleur·euses mais éga­le­ment en tant que per­sonnes oppri­mées en rai­son de leur genre, qu’elles soient cis, trans’, non binaires ou queers. Nous déve­lop­pons des cam­pagnes des­ti­nées à chan­ger maté­riel­le­ment la vie des femmes (contre les vio­lences sexuelles et sexistes au tra­vail et les inéga­li­tés sala­riales), nous sou­hai­tons en déve­lop­per d’autres des­ti­nées à chan­ger maté­riel­le­ment la vie de ces per­sonnes oppri­mées et à décons­truire les normes du genre, en lien avec les asso­cia­tions fémi­nistes et notre Union syndicale.

- l’antiracisme : SUD édu­ca­tion doit deve­nir un acteur majeur dans les luttes anti­ra­cistes. Cette ques­tion tra­verse en effet toute la socié­té et notam­ment l’Éducation nationale.

- les condi­tions de tra­vail : leur dégra­da­tion est constante. Le dis­cours de SUD édu­ca­tion doit réson­ner avec les dif­fi­cul­tés des col­lègues au quo­ti­dien, cette pré­oc­cu­pa­tion doit être omni­pré­sente dans nos expressions.

- l’opposition aux réformes libé­rales : SUD édu­ca­tion doit affir­mer, de la manière la plus expli­cite qui soit, son oppo­si­tion aux réformes libé­rales et anti-sociales du gou­ver­ne­ment, et être iden­ti­fié comme le syn­di­cat qui porte cette ligne de la manière la plus claire, il s’agit de mieux nous armer pour la lutte des classes.

- les pro­blé­ma­tiques autour des pré­caires doivent notam­ment être ren­for­cées, à la fois, pour défendre, for­mer et infor­mer les per­son­nels pré­caires et pour lut­ter contre la précarité.

- les salaires : SUD édu­ca­tion conti­nue­ra de mettre en évi­dence l’im­por­tance du com­bat pour une hausse des salaires et la légi­ti­mi­té de cette reven­di­ca­tion. C’est aus­si par cette lutte que SUD édu­ca­tion peut défendre une évo­lu­tion de car­rière unique pour plus d’é­ga­li­té (refus des primes de tout ordre qui ne font que divi­ser les per­son­nels sans pro­po­ser d’aug­men­ta­tion réelle et pérenne des salaires).

-les effec­tifs : les effec­tifs réduits par classe sont une condi­tion néces­saire à un ensei­gne­ment de qua­li­té. « On enseigne mieux lorsqu’on a moins d’élèves en classe, on apprend mieux quand on est moins en classe. »

- la for­ma­tion : les injonc­tions du minis­tère laisse de moins en moins de place à la for­ma­tion et donc à la réflexion des enseignant·es sur leurs pra­tiques. SUD édu­ca­tion doit reven­di­quer une for­ma­tion par les pairs qui tiennent compte des apports des sciences de l’éducation dans leur diversité.

- l’opposition à l’extrême droite sous toutes ses formes : les bons scores du FN/​RN, la mul­ti­pli­ca­tion des pro­vo­ca­tions, inti­mi­da­tions et actes vio­lents des grou­pus­cules fas­cistes, nous invitent à ampli­fier le com­bat contre les injus­tices et pour l’égalité des droits. Ce com­bat est d’autant plus néces­saire que se déve­loppe paral­lè­le­ment une légis­la­tion de plus en plus liber­ti­cide. Pour ce faire, SUD édu­ca­tion par­ti­cipe acti­ve­ment à la com­mis­sion anti­fas­ciste de Solidaires et au déve­lop­pe­ment de VISA locaux.

- les vio­lences poli­cières : qu’elles s’exercent dans les quar­tiers popu­laires ou contre les mobi­li­sa­tions sociales (comme celles contre les lois tra­vail ou celle des Gilets jaunes), les vio­lences poli­cières sont l’un des prin­ci­paux outils du main­tien de l’ordre capitaliste.

Leur carac­tère raciste est mani­feste dans de nom­breux cas : c’est ce qui a pro­vo­qué les fortes mobi­li­sa­tions en juin 2019 après la mort de George Floyd et à l’appel du Comité Justice et véri­té pour Adama Traoré. De nom­breux jeunes ont pris part aux mobi­li­sa­tions dans les dif­fé­rentes villes (et on se sou­vient du sort réser­vé aux jeunes du Mantois en 2018) et nombre de nos élèves des classes popu­laires sont régu­liè­re­ment confron­té-e‑s aux vio­lences policières.

La mobi­li­sa­tion contre la loi dite de « sécu­ri­té glo­bale » a éga­le­ment démon­tré que la défense des liber­tés publiques est un enjeu fort dans la période et qu’une orga­ni­sa­tion syn­di­cale comme la nôtre doit y prendre toute sa place.

Ces pro­blé­ma­tiques répondent à un double objec­tif : ser­vir les inté­rêts des tra­vailleurs et des tra­vailleuses et le déve­lop­pe­ment de notre syn­di­ca­lisme « en avance » sur ces thèmes par rap­port aux autres orga­ni­sa­tions syndicales.

3.5. les élec­tions professionnelles

Les élec­tions pro­fes­sion­nelles sont un outil com­plé­men­taire dans notre déve­lop­pe­ment. La pré­sence d’élu·es dans les ins­tances nous permet :

- d’ obser­ver les pra­tiques de la hié­rar­chie, même si la fin du pari­ta­risme opa­ci­fie davan­tage les déci­sions prises ;

- d’avoir accès aux docu­ments de ges­tion et d’organisation de l’Éducation natio­nale ou des éta­blis­se­ments d’enseignement supé­rieur et orga­nismes de recherche, de les sor­tir de la confi­den­tia­li­té et d’être ain­si un appui pour les luttes ;

- d’avoir une légi­ti­mi­té et une effi­ca­ci­té face à la hié­rar­chie pour défendre les personnels.

Les résul­tats aux élec­tions sont un indi­ca­teur de la sen­si­bi­li­té de nos col­lègues à nos reven­di­ca­tions et à nos pra­tiques. Ces résul­tats reflètent éga­le­ment notre capa­ci­té à mener cam­pagne effi­ca­ce­ment et à faire voter pour SUD édu­ca­tion. Ils nous assurent (ou pas) la repré­sen­ta­ti­vi­té natio­nale, qui nous confère un volume de décharges de droit, à la dif­fé­rence de la situa­tion d’aujourd’hui, au niveau natio­nal pour l’Éducation nationale.

Du fait de nos défaites suc­ces­sives en 2014 et en 2018 pour le CTMEN, le scru­tin de 2022 revêt un enjeu par­ti­cu­lier. Pour retrou­ver notre repré­sen­ta­ti­vi­té natio­nale dans l’Éducation natio­nale et la conser­ver au niveau de l’ESR, pour assu­rer la péren­ni­té de notre pro­jet syn­di­cal, nous devons nous don­ner les moyens d’avoir le maxi­mum de listes et de déve­lop­per sur le ter­rain une cam­pagne offen­sive, qui s’appuie sur les luttes.

Le congrès de la Fédération fait de cet objec­tif une priorité.

Conclusion : Toujours un syn­di­ca­lisme de lutte et de trans­for­ma­tion sociale.

SUD édu­ca­tion est un outil syn­di­cal. Il par­ti­cipe à la défense et à l’é­man­ci­pa­tion des travailleur·euses au tra­vers des for­ma­tions et des infor­ma­tions. Son sou­tien et sa par­ti­ci­pa­tion dans les luttes favo­risent l’autogestion.

Nous nous ins­cri­vons dans le com­bat social anti­ca­pi­ta­liste, pour une socié­té et une école éman­ci­pa­trice. Nous vou­lons contri­buer à inver­ser le rap­port de force social contre la classe des pos­sé­dants qui mène actuel­le­ment une offen­sive vio­lente, ultra-réac­tion­naire et liber­ti­cide, contre toute idée émancipatrice .

Notre mili­tan­tisme syn­di­cal contri­bue, en arti­cu­lant défense indi­vi­duelle et action col­lec­tive, à lut­ter contre la hié­rar­chie et les pro­jets réac­tion­naires. En fai­sant ce lien, nous œuvrons à la défense des droits et à armer les col­lègues contre les attaques indi­vi­duelles et col­lec­tives. C’est ce pro­fil que nous met­tons en avant dans les élec­tions pro.

SUD édu­ca­tion aug­mente tou­jours son nombre d’adhérent·es après une lutte, à charge des syn­di­cats locaux auto­nomes de trans­for­mer ce nombre crois­sant d’adhérent·es en votes pour les pro­chaines élec­tions pro­fes­sion­nelles de 2022 afin de ten­ter de rega­gner notre siège au CTMEN.

Conscient·es de notre force col­lec­tive, nous mili­tons dans notre sec­teur et aus­si pour un mou­ve­ment inter­pro­fes­sion­nel fort, une grève recon­duc­tible, pour impo­ser un plan d’urgence pour les ser­vices publics, en par­ti­cu­lier dans la san­té et l’éducation, contre les licen­cie­ments massifs.


Pour un accueil digne des élèves allophones et de leurs familles

L’accueil des élèves allo­phones par l’é­du­ca­tion natio­nale est à l’i­mage de l’ac­cueil des étranger·es par la France. Le dur­cis­se­ment des lois sur l’im­mi­gra­tion a un impact sur la sco­la­ri­sa­tion de ces élèves et de leurs familles qui sont aujourd’­hui qualifié·es de « migrant·es ». Nous avons de plus en plus d’en­fants de famille sans papier et à la rue, mais aus­si de Jeunes isolé·es étranger·es, dans nos classes. Par ailleurs, les élèves français⋅es allo­phones ren­contrent les mêmes pro­blé­ma­tiques et ne béné­fi­cient trop sou­vent d’aucun dis­po­si­tif spé­ci­fique. Le capi­ta­lisme, loin d’ou­vrir les fron­tières, sou­haite une immi­gra­tion maî­tri­sée, pour ne pas dire « choi­sie », en témoigne les der­nières lois « asile et immi­gra­tion » votées en sep­tembre 2018 par le gou­ver­ne­ment Edouard Philippe.

Utiliser le terme « migrant·e » n’est pas ano­din. Il sert le sys­tème capi­ta­liste dans le sens où il lisse la notion d’étranger·e, il exclut de fait l’étranger·e qui ne doit pas res­ter en France. Il stig­ma­tise les per­sonnes d’un autre pays en ancrant dans nos repré­sen­ta­tions l’i­mage du ou de la migrant·e de pas­sage, vivant dans une « Jungle de Calais ». SUD édu­ca­tion pré­fère le terme d » immigré·es qui raconte une his­toire, celle de l’im­mi­gra­tion et des luttes. Il marque une volon­té de res­ter dans le pays choisi.

A l’é­cole aus­si, les CLIN (classe d’i­ni­tia­tion ), les CLA (classe d’ac­cueil) et les CLA-ENSA (Élèves Non Scolarisé⋅es anté­rieu­re­ment) ont été rem­pla­cées par des dis­po­si­tifs UPE2A et UPE2A-NSA avec la cir­cu­laire d’oc­tobre 2012 signée Jean Michel Blanquer (déjà!). L’idée prin­ci­pale était d’in­clure davan­tage les élèves dans leur classe d’af­fec­ta­tion. En réa­li­té, l’Éducation natio­nale a fait des éco­no­mies en sup­pri­mant des heures pour récu­pé­rer des postes. En effet, dans les classes d’ac­cueil les élèves béné­fi­ciaient de 23 à 26 heures de cours par semaine. Aujourd’hui dans les dis­po­si­tifs les élèves n’ont plus que 9 à 18 heures de cours heb­do­ma­daires. Dans le 1er degré la notion de dis­po­si­tif a per­mis à l’ad­mi­nis­tra­tion de ne fixer aucune limite au nombre d’é­lèves accueilli·es. S’ajoute à cela un par­cours des familles très dif­fi­cile pour inté­grer un dis­po­si­tif, un racisme ins­ti­tu­tion­nel et une orien­ta­tion déter­mi­née. Sans comp­ter la pro­blé­ma­tique du loge­ment et des démarches admi­nis­tra­tives qui ne faci­litent pas des appren­tis­sages dans de bonnes conditions.

Les condi­tions de vie et de sco­la­ri­sa­tion des élèves allophones

L’espace d’ac­cueil est le lieu unique d’ac­cueil pour la sco­la­ri­sa­tion des enfants allo­phones de 6 à 17 ans. Les familles ont un entre­tien et les élèves sont testé·es dans la langue pre­mière. Suite à ce test, la famille reçoit une pro­po­si­tion d’af­fec­ta­tion. Cette pro­po­si­tion d’af­fec­ta­tion passe par un ser­vice du rec­to­rat qui envoie une noti­fi­ca­tion à la famille et à l’é­ta­blis­se­ment retenu.

Il se passe envi­ron deux mois entre la pres­crip­tion d’af­fec­ta­tion de l’es­pace d’ac­cueil et cette noti­fi­ca­tion. À noter, beau­coup d’er­reurs du ser­vice du rec­to­rat qui sur­charge des dis­po­si­tifs alors que d’autres sont vides. La noti­fi­ca­tion sti­pu­lant l’é­ta­blis­se­ment d’af­fec­ta­tion n’ar­rive pas tou­jours aux familles.

Pour cause le pro­blème du loge­ment : l’a­dresse pos­tale n’est pas tou­jours fixe, elle peut aus­si être inexis­tante ou tem­po­raire. Les loge­ments des familles deman­deuses d’a­sile sont tou­jours tem­po­raires tant que la demande d’a­sile n’est pas trai­tée. Elles sont logées en CADA dans le meilleur des cas. Et pour les « Jeunes isolé·es étranger·es », les choix bud­gé­taires des col­lec­ti­vi­tés se font la plu­part du temps au détri­ment d’un sui­vi indi­vi­dua­li­sé. Débordé·es, les édu­ca­teurs et édu­ca­trices doivent faire face à des héber­ge­ments écla­tés et pré­caires (foyers,hôtels…) qui rendent l’accueil de ces jeunes indigne.

Les ser­vices du rec­to­rat n’as­surent pas un réel accom­pa­gne­ment des élèves allo­phones, les fiches péda­go­giques sont trans­mises avec des délais trop longs et de manière incom­plète à l’enseignant·e d’UPE2A référent·e envi­ron 4 mois. L’établissement ne peut connaître du ou de la nouvel·le élève que son nom et sa date de nais­sance (même pas sa langue première).

Dans l’é­ta­blis­se­ment l’Inscription peut être un par­cours com­plexe : com­prendre où est situé l’é­ta­blis­se­ment, s’y rendre, rem­plir un dos­sier d’ins­crip­tion, four­nir des papiers que l’on ne pos­sède pas.…

Une seule année en dis­po­si­tif UPE2A est insuf­fi­sante pour une inclu­sion totale dans une classe. Ces élèves ont besoin de temps, ils·elles ont vu et vécu par­fois des évé­ne­ments très lourds et mar­quants dans leur pays d’o­ri­gine. L’école capi­ta­liste, dans sa course à la sélec­tion et au tri, ne s’in­té­resse pas à ces élèves. Dès lors, aucune orien­ta­tion choi­sie n’est pos­sible : les élèves sont voué·es à l’é­chec ou à com­bler les sec­teurs en manque de main d’œuvre. Quasiment aucun·e élève allo­phone en 3ème ne part en seconde géné­rale, ils·elles sont presque toutes et tous orienté·es en voie pro­fes­sion­nelle mais depuis 2019, il n’y a plus de CAP prio­ri­taire après la 3ème.

Une fois l’o­rien­ta­tion pro­non­cée, l’é­lève peut par­fois renon­cer et n’a donc aucun diplôme.

La pro­blé­ma­tique de l’en­fant allo­phone en situa­tion de han­di­cap est non reconnue.

Les Inclusions sont com­pli­quées du fait de la sur­charge des effec­tifs dans les classes et par­fois à la mul­ti­pli­ci­té des dis­po­si­tifs (ULIS ou autres) à l’in­té­rieur d’un même éta­blis­se­ment. Les col­lègues sont alors réticent·es, ils et elles oublient d’in­clure les élèves allo­phones lors des voyages sco­laires ou des sor­ties. En effet, les démarches et for­ma­li­tés admi­nis­tra­tives pour par­ti­ci­per à des sor­ties se com­pliquent lorsqu’un·e élève est sans papier, sans argent, à la rue, sans accès à inter­net avec une famille non-fran­co­phone et que le·la col­lègue ne trouve pas d’interprète.

SUD édu­ca­tion dénonce l’hy­po­cri­sie de l’Éducation natio­nale : dans les textes il y a bien obli­ga­tion de sco­la­ri­sa­tion des enfants étranger·es sur le ter­ri­toire fran­çais, en réa­li­té les moyens alloués pour ces élèves se réduisent à peau de cha­grin depuis 2012 et sont insuf­fi­sants au vu de leurs condi­tions de vie. La bourse est dif­fi­ci­le­ment acces­sible tout comme la gra­tui­té de la can­tine. Et quand les familles obtiennent la bourse, l’argent sert d’a­bord à payer la cantine.

Pire encore, l’é­tat capi­ta­liste uti­lise par­fois l’é­cole pour arrê­ter les parents des élèves sans papiers avec l’aide de sa police. Le lien avec RESF est à pour­suivre et même à ampli­fier. Aujourd’hui, le cadre natio­nal de la « Marche des soli­da­ri­tés » est struc­tu­rant pour les luttes pour l’égalité des droits entre français·es et immigré·es. SUD édu­ca­tion pro­po­se­ra d’y ins­crire la ques­tion de la jeu­nesse immi­grée sco­la­ri­sée comme axe reven­di­ca­tif. SUD édu­ca­tion, en s’appuyant sur les col­lec­tifs et les dyna­miques locales, por­te­ra éga­le­ment comme objec­tif la construc­tion d’une date de mobi­li­sa­tion natio­nale sur la ques­tion des injus­tices que vivent les Jeunes isolé·es étranger·es. Nous reven­di­quons la sco­la­ri­sa­tion des jeunes en pro­cé­dure de recon­nais­sance de leur mino­ri­té qui ne doivent pas être privé·es de leurs droits en attente de la déci­sion. La majo­ri­té n’est pas un argu­ment pour confis­quer le droit à l’éducation d’autant plus que ça ne l’est pas pour les élèves de natio­na­li­té française.

Le racisme ins­ti­tu­tion­nel et inté­rio­ri­sé qui touche aus­si les élèves allophones

Les élèves d’UPE2A vivent le racisme ordi­naire et ins­ti­tu­tion­nel, de manière par­fois plus vio­lente que les autres élèves.

Certains per­son­nels ou élèves, par­tant du prin­cipe qu’ils et elles arrivent direc­te­ment d’un pays étran­ger, fan­tasment une appar­te­nance à une culture, à une reli­gion avec tous les sté­réo­types et pré­ju­gés asso­ciés dans leurs esprits à cette culture ou à cette religion.

Les paroles et les faits et gestes des UPE2A sont scru­tés, sou­vent incons­ciem­ment, car ils pour­raient être des signes de remise en cause de la laï­ci­té et des fameuses « valeurs de la République », trop sou­vent ins­tru­men­ta­li­sées de manière raciste.

S’il convient de faire preuve de péda­go­gie et de for­ma­tion auprès de nos col­lègues, il est éga­le­ment néces­saire de repé­rer et com­battre toutes les formes de dis­cri­mi­na­tion auprès de nos élèves et de leurs familles.

Revendications :

- Double ins­crip­tion des élèves allo­phones, en les comp­ta­bi­li­sant dans l’effectif glo­bal, ce qui per­met­trait d’abaisser les moyennes de classes dans les éta­blis­se­ments concer­nés pour favo­ri­ser leur intégration.

- Des effec­tifs de 15 élèves maxi­mum en UPE2A et 12 élèves maxi­mum en UPE2A-NSA.

- Des per­son­nels formé·es aux besoins spé­ci­fiques des élèves allo­phones (déve­lop­per l’enseignement du Français Langue Seconde au moyen de décharges horaires ?).

- Ouvrir des classes d’accueil sur tout le territoire.

- Les UPE2A doivent être ouverts à côté des struc­tures qui accueillent des étranger·es.

- Pas d’UPE2A à mi-temps sur une école.

- Une for­ma­tion pour les per­son­nels qui accueillent les élèves allophones.

- L’abrogation du Code de l’entrée et du séjour du droit d’asile.

- Pour le retour à une classe d’accueil et non un dispositif.

- Pour la sco­la­ri­sa­tion incon­di­tion­nelle des jeunes étranger·es allo­phones au sein du ser­vice public d’é­du­ca­tion indé­pen­dam­ment de l’âge, la natio­na­li­té et du sta­tut admi­nis­tra­tif (avec ou sans-papiers).

- Pour la réap­pro­pria­tion du terme d’immigré·e lié à une his­toire d’im­mi­gra­tion, de colo­ni­sa­tion et de luttes.

- Pour des per­son­nels pérennes et qua­li­fiés dans les espaces d’accueil.

- Pour plus d’es­paces d’accueil.

- Retour aux classes d’accueil fixes dans les écoles et les éta­blis­se­ments avec des enseignant·es spécialisé·es pour accueillir les élèves allo­phones à la place des actuels dis­po­si­tifs UPE2A.

- Pour une durée d’ac­cueil des élèves dans les dis­po­si­tifs adap­tés aux besoins de chaque élève pour une orien­ta­tion choi­sie et non subie.

- Pour la sup­pres­sion d’Affelnet.

- Pour l’en­sei­gne­ment des langues d’o­ri­gine des élèves dans les établissements.

- Pour des postes d’in­ter­prètes dans l’é­du­ca­tion nationale.

- Pour la réqui­si­tion de loge­ments, notam­ment les loge­ments de fonc­tion vides dans l’éducation natio­nale, pour la mise à dis­po­si­tion de loge­ments pérennes et salubres pour l’ensemble des familles mal-logées, et contre les expul­sions des squats

- Pour la réqui­si­tion de loge­ments, notam­ment les loge­ments de fonc­tion vides dans l’é­du­ca­tion natio­nale, et l’ou­ver­ture de squats.

- Pour l’arrêt des OQTF et des expul­sions, pour la déli­vrance sans condi­tions de titres de séjour vie pri­vée et fami­liale pour toutes et tous les Jeunes isolé·es étranger·es et de tou·tes les élèves dit·es sans papiers. 

- Pour l’auto-formation entre pairs asso­ciée a une for­ma­tion spé­ci­fique, des­ti­née à l’ensemble des per­son­nels et dis­pen­sée par des per­sonnes qua­li­fiées (hors Éducation nationale).

- Pour l’ou­ver­ture des frontières.

- Pour la régu­la­ri­sa­tion des familles des élèves allophones.


Pour une école polytechnique et polyvalente

La trans­for­ma­tion de la socié­té est for­te­ment cor­ré­lée à celle de l’école. Nous cher­chons à abo­lir les hié­rar­chies sociales et les domi­na­tions pour que chacun·e puisse s’émanciper dans le par­tage des tâches et le par­tage des richesses.

Depuis la créa­tion de la fédé­ra­tion SUD édu­ca­tion, nous com­bat­tons les poli­tiques libé­rales qui sont autant d’attaques contre le ser­vice public d’éducation et aggrave les inéga­li­tés sco­laires et sociales.

Dans le même temps, l’offensive contre l’École publique se déve­loppe éga­le­ment autour de mou­vances créant des écoles pri­vées hors contrats avec une récu­pé­ra­tion et un détour­ne­ment des « péda­go­gies alternatives ».

Avec l’accession de Blanquer au minis­tère de l’Éducation natio­nale, se ren­force une ges­tion auto­ri­taire qui vise l’imposition de pra­tiques péda­go­giques aux cau­tions scien­ti­fiques contestables.

Dans ce contexte, la fédé­ra­tion SUD édu­ca­tion cherche à pro­mou­voir une autre école : ouverte à toutes et tous, un ser­vice public qui crée du com­mun face aux logiques individualistes.

Elle réaf­firme comme essen­tielle la défense d’une École publique laïque, éga­li­taire et éman­ci­pa­trice, qui per­mette une édu­ca­tion poly­tech­nique pour tou·tes jusqu’à 18 ans.

1/​Émancipation, Anti auto­ri­té, Autogestion 

Au préa­lable, pour obte­nir notre école éman­ci­pa­trice, nous reven­di­quons un véri­table plan d’ur­ba­nisme per­met­tant la mixi­té sociale au sein des écoles, natio­na­li­sa­tion sans contre­par­tie de l’enseignement pri­vé, inté­gra­tion de ses per­son­nels à la Fonction publique et la réqui­si­tion des locaux. Il est néces­saire éga­le­ment d’uniformiser et d’augmenter les bud­gets alloués à chaque élève afin de contre­car­rer les inéga­li­tés ter­ri­to­riales et sous­traire l’école à des logiques de poli­tiques locales. Nous reven­di­quons aus­si la fin de l’enseignement pri­vé, et donc la réin­té­gra­tion de ces éta­blis­se­ments dans le public, du fait de la sélec­tion de classe qui s’y opère.

Un éta­blis­se­ment anti-auto­ri­taire et éman­ci­pa­teur est un éta­blis­se­ment qui pos­sède une vie poli­tique forte. Celle-ci se déroule selon des prin­cipes de coopé­ra­tion et d’autogestion dans l’établissement comme dans la classe. Nous reven­di­quons une direc­tion des éta­blis­se­ments du pre­mier et du second degré ain­si que du supé­rieur qui soit col­lé­giale et man­da­tée par les per­son­nels. Cette direc­tion devra être subor­don­née à un conseil, prin­ci­pal organe de déci­sion de l’établissement, et com­po­sé de représentant⋅es élu⋅es des per­son­nels, des élèves et des parents. Ces ins­tances seront orga­ni­sées de sorte à y limi­ter le pou­voir des per­sonnes pri­vi­lé­giées de par leur genre, milieu social etc. La par­ti­ci­pa­tion aux déci­sions de l’établissement devra être incluse dans le temps de tra­vail des per­son­nels et dans le temps sco­laire des élèves.

De même, les élèves doivent pou­voir par­ti­ci­per aux décisions de la classe et de l’école et jouer un rôle dans l’organisation de leurs activités sco­laires. Ils et elles doivent pou­voir échanger avec l’adulte, construire leur esprit cri­tique et leur par­cours d’apprentissage.

Une école éman­ci­pa­trice, c’est aus­si une école qui se dégage des injonc­tions per­for­ma­tives et du sys­tème indi­vi­dua­liste actuel. Ce fonc­tion­ne­ment nour­rit un sen­ti­ment de com­pé­ti­tion contraire à l’es­prit de coopé­ra­tion que l’é­cole devrait trans­mettre et des­sert les visées péda­go­giques. Il sert à ali­men­ter la fonc­tion de tri social du système éducatif, au détriment de sa fonc­tion d’enseignement. C’est pour­quoi nous met­tons en avant les éva­lua­tions non stan­dar­di­sées construites et adap­tées par les enseignant·es et qui aident les élèves à se les appro­prier et à les comprendre.

Une des mani­fes­ta­tions de cette fonc­tion de tri social du sys­tème édu­ca­tif est le bac, qui classe les élèves, qui limite l’accès aux études supé­rieures et qui repré­sente une éva­lua­tion unique. Nous reven­di­quons le retrait de la réforme du bac et nous sou­hai­tons donc enga­ger une réflexion col­lec­tive sur la per­ti­nence et la fina­li­té de cette éva­lua­tion qu’est le bac, en cohé­rence avec le pro­jet d’école éman­ci­pa­trice qui redonne aux élèves leur place dans l’appropriation des savoirs et qui inclut le refus de la nota­tion for­melle et de la compétition.

Nous reven­di­quons la fin des éva­lua­tions per­ma­nentes : bacho­tage dès la mater­nelle, éva­lua­tions natio­nales en pri­maire et en col­lège, réforme du bac, …. qui trans­forment et réduisent le métier d’enseignant·e à des tâches de pré­pa­ra­tion et de cor­rec­tions per­ma­nentes, et qui empêchent de don­ner du sens aux enseignements.

Nous reven­di­quons la fin des ins­pec­tions et des ren­dez-vous de car­rière : Ces dis­po­si­tifs ont d’abord une fonc­tion de contrôle et de répres­sion du corps ensei­gnant et il serait sou­hai­table de les rem­pla­cer par des sys­tèmes de (co)formation entre pairs.

Nous reven­di­quons des éta­blis­se­ments ouverts sur le monde extra-sco­laire, qui tra­vaille davan­tage à l’intégration des res­pon­sables des élèves et du tis­su asso­cia­tif local et natio­nal dans le cadre scolaire.

Nous reven­di­quons l’aménagement de cours de récréa­tion non gen­rées. Les espaces et temps de récréa­tion doivent être réamé­na­gés pour per­mettre un véri­table temps de res­pi­ra­tion des élèves dans le res­pect de toutes et tous, en évi­tant que puissent s’exer­cer les rap­ports de domi­na­tion qui tra­versent la société.

Nous reven­di­quons le retrait de toute marque de natio­na­lisme dans l’enceinte des éta­blis­se­ments : ni dra­peau, ni hymne natio­nal affichés.

Enfin, une école éman­ci­pa­trice doit favo­ri­ser l’égalité sociale. Il est de fait néces­saire de répar­tir le bud­get d’éducation de manière à contre­car­rer les inéga­li­tés ter­ri­to­riales et sociales.

2/​Polyvalence, polytechnicité

Notre pro­jet d’école démo­cra­tique sup­pose la mise en place d’une poli­tique édu­ca­tive qui par des moyens accrus, des péda­go­gies coopé­ra­tives et éman­ci­pa­trices s’attaque vrai­ment à la repro­duc­tion des inéga­li­tés sociales. Ce pro­jet est bâti autour de la notion de poly­va­lence et de polytechnicité.

Il faut déve­lop­per les appren­tis­sages de notions manuelles non-gen­rées et valo­ri­ser les appren­tis­sages tech­niques et artis­tiques ain­si que les capa­ci­tés psy­cho­so­ciales des élèves. Loin de s’op­po­ser aux « fon­da­men­taux », ceux-ci consti­tuent au contraire une oppor­tu­ni­té pour pra­ti­quer et don­ner un sens à la lec­ture, l’é­cri­ture ou les mathé­ma­tiques, en les ins­cri­vant dans des acti­vi­tés moti­vantes et variées. Pour cela cer­tains élé­ments sont indis­pen­sables : créa­tion d’espaces dédiés pour mettre en pra­tique ces appren­tis­sages, allo­ca­tion de moyens, d’outils et de for­ma­tions pour les per­son­nels et bien sûr un tra­vail en effec­tifs réduits.

Dans le second degré, cela signi­fie de réa­li­ser vrai­ment le col­lège unique, sans filière d’excellence, qui déve­loppe des ensei­gne­ments géné­raux en cohé­rence avec des ensei­gne­ments manuels non gen­rés, expli­ci­tés pour le 1er degré.

Cela sup­pose une refon­da­tion totale du lycée, de ses impli­ca­tions pour la sco­la­ri­té des jeunes, et de l’organisation des ensei­gne­ments. L’actuelle réforme du « lycée Blanquer » aggrave les inéga­li­tés entre éta­blis­se­ments, les élèves et aban­donne un cadre natio­nal de l’offre d’ap­pren­tis­sage. Notre pro­jet est en cohé­rence avec les reven­di­ca­tions que nous por­tons déjà dans le cadre des 3 lycées actuels. Le lycée unique, c’est la fusion de ces trois lycées pour y accueillir toutes et tous les élèves. C’est un lycée poly­tech­nique, qui ne hié­rar­chise pas les matières mais allie matières dites géné­rales, les dis­ci­plines artis­tiques, spor­tives et cultu­relles mais aus­si les matières tech­niques et manuelles. C’est aus­si la fin de l’orientation pré­coce et une sco­la­ri­sa­tion obli­ga­toire pous­sée jusqu’à 18 ans, impli­quant la fin de l’apprentissage pour les mineur⋅es.

Ce lycée refuse la logique de la spé­cia­li­sa­tion de l’actuelle réforme du lycée mais aus­si le retour aux filières. Le but étant que les élèves puissent s’é­pa­nouir et se déve­lop­per en tant que per­sonne dans un envi­ron­ne­ment dénué de pres­sions et de com­pé­ti­tions liées à leur sco­la­ri­té ou au monde du travail.

3/​École éco­lo­gique et ouverte

Face à l’urgence cli­ma­tique, notre école poly­tech­nique pro­meut dans ses pra­tiques quo­ti­diennes et ses ensei­gne­ments théo­riques une réflexion autour d’« habi­ter la terre » en tant que « loca­taire tem­po­raire » et donc autour de l’usage des res­sources de notre pla­nète, cette même terre.

Nous reven­di­quons l’abandon du concept de déve­lop­pe­ment durable et appe­lons à une édu­ca­tion à l’urgence cli­ma­tique, dans le cadre d’une approche sys­té­mique et plu­ri­dis­ci­pli­naire, à la fois théo­rique et pra­tique afin d’outiller les futures géné­ra­tions pour les enjeux à venir.

Pour cela, il faut favo­ri­ser au sein des ensei­gne­ments le rap­pro­che­ment entre élèves et la nature par des ins­tal­la­tions sco­laires maté­rielles concrètes dans une école ouverte sur la nature et le monde, des pro­jets et sor­ties péda­go­giques tour­nées vers des acti­vi­tés concrètes, ludiques, et créa­tives en petits groupes : créa­tion de jar­dins pota­gers, ate­liers de répa­ra­tion et de construc­tion des objets de la vie cou­rante, low tech etc …

A l’heure de la crise éco­lo­gique, nous appe­lons à un plan d’urgence pour réno­ver le bâti sco­laire et ain­si construire maté­riel­le­ment l’école poly­tech­nique, une école ins­crite au cœur de nos espaces urbains. Pour cela, nous revendiquons :

- un plan de réno­va­tion recons­truc­tion du bâti sco­laire pour la réduc­tion des consom­ma­tions éner­gé­tiques (iso­la­tion des bâti­ments, pro­gramme de réduc­tion des consom­ma­tions…) et en eau,

- le désa­mian­tage des éta­blis­se­ments sco­laires dans le cadre de l’application du Plan amiante,

- l’aménagement des abords des écoles pour faire plus de place au vélo et aux dépla­ce­ments pédestres,

- un plan de dimi­nu­tion et recy­clage des déchets,

- la créa­tion d’un cadre de vie sain dans les écoles pour les per­son­nels et les élèves/​généraliser les détec­teurs de pol­lu­tion et ou cap­teurs de qua­li­té de l’air.

- re-déve­lop­per les réseaux filaires dans tous les bâti­ments sco­laires pour réduire l’usage du wifi,

- un plan de végé­ta­li­sa­tion des éta­blis­se­ments scolaires,

- la mise en place d’une res­tau­ra­tion sco­laire, qui per­met­trait de bais­ser l’impact envi­ron­ne­men­tal de la nour­ri­ture ser­vie, de nour­rir sai­ne­ment les membres de la com­mu­nau­té édu­ca­tive. La prio­ri­té sera don­née aux pro­duc­trices et pro­duc­teurs locaux, à l’agriculture pay­sanne et bio, à la baisse de la consom­ma­tion de nour­ri­ture car­née et à la par­ti­ci­pa­tion des élèves, pour mettre un terme à la main­mise des entre­prises de res­tau­ra­tion col­lec­tive et de leurs intermédiaires.

Nous vou­lons déve­lop­per chez les usager⋅ères des écoles et des éta­blis­se­ments de la mater­nelle à l’Université la conscience que nous coha­bi­tons avec l’ensemble des êtres vivants afin de mettre en avant la biodiversité

4/​Numérique et école ?

Le numé­rique pose aus­si des ques­tions quant à son impact sur l’environnement, qui doivent être prises en compte dans son uti­li­sa­tion, notam­ment sa pro­duc­tion maté­rielle et sa consom­ma­tion éner­gé­tique. En effet, nous ne pou­vons pas prô­ner une édu­ca­tion rési­liente et pro­tec­trice de l’environnement et uti­li­ser des outils des­truc­teurs. Il faut donc favo­ri­ser une véri­table pra­tique éco­lo­gique du numé­rique en met­tant en place la col­lecte et le tri des déchets numé­riques par exemple.

La place du numé­rique dans notre école poly­tech­nique doit être mesu­rée et ne doit pas rem­pla­cer les appren­tis­sages col­lec­tifs au contact de l’enseignant⋅e, il faut donc refu­ser la géné­ra­li­sa­tion du tra­vail en dis­tan­ciel. Nos élèves et nous-mêmes devons être en capa­ci­té d’utiliser le numé­rique à des fins émancipatrices.

En l’état actuel des choses, de nom­breuses uti­li­sa­tions du numé­rique au sein de l’Éducation natio­nale sont oppres­sives tel que le fichage de nos élèves via les bases LSUN, ONDE ou encore l’utilisation de Pronote. Il est par ailleurs urgent d’imposer notre droit à la décon­nexion face aux com­mu­ni­ca­tions avec l’administration, les parents et les élèves qui se font de plus en plus hors temps sco­laire. De plus, cer­taines entre­prises comme les GAFAMs cherchent à pro­fi­ter de l’entrée du numé­rique à l’école pour pro­po­ser leurs services.

Ces pra­tiques doivent nous ame­ner à nous ques­tion­ner sur le type de numé­rique que nous sou­hai­tons valo­ri­ser. Si notre école doit être poly­va­lente et poly­tech­nique, nous devons être capables de nous ser­vir de cer­tains outils numé­riques qui vont per­mettre, voire accen­tuer les pos­si­bi­li­tés de coopé­ra­tion. Ainsi, il faut favo­ri­ser l’usage d’outils numé­riques libres dont la phi­lo­so­phie même se veut coopé­ra­tive et libé­ra­trice. Le déve­lop­pe­ment de tels outils doit être une par­tie inté­grante du ser­vice public, appuyée sur une infra­struc­ture et des moyens humains alloués à cet effet, avec un objec­tif d’é­man­ci­pa­tion du sec­teur pri­vé du numé­rique. Mais cet usage ne peut se faire que de manière éga­li­taire en allouant des moyens véri­tables à tou·tes pour ne pas repro­duire les inéga­li­tés sociales exis­tantes. Les dif­fé­rentes pra­tiques péda­go­giques éman­ci­pa­trices peuvent être uti­li­sées et valo­ri­sées grâce aux tech­no­lo­gies de l’information et de la communication.

L’usage du numé­rique – d’autant plus s’il se veut éman­ci­pa­teur – ne s’improvise pas. Il faut appré­hen­der les dif­fi­cul­tés, connaître les dif­fé­rents outils et leurs fonc­tion­na­li­tés, réflé­chir à dif­fé­rents moyens de pal­lier à l’absence du vivant, du réel dans la rela­tion pédagogique.


Anti-hiérarchie et autogestion

Du refus des réformes actuelles ren­for­çant l’au­to­no­mie, des hié­rar­chies locales à l’au­to­ges­tion et à un véri­table refus de la hié­rar­chie. A l’opposé de cette concep­tion de l’autonomie dans la logique néo-mana­gé­riale, notre syn­di­ca­lisme défend l’autonomie ouvrière, c’est-à-dire que pour s’é­man­ci­per, le pro­lé­ta­riat doit déve­lop­per son auto­no­mie par rap­port à la sphère du capi­tal : c’est nous qui tra­vaillons, c’est à nous de nous orga­ni­ser et de décider. 

Dans un monde où elle domine les tra­vailleuses et les tra­vailleurs, la classe capi­ta­liste impose de plus en plus, à celle-ci, une sou­mis­sion à la hié­rar­chie. L’Éducation natio­nale n’est pas épar­gnée, au contraire.

Les réformes actuelles qui ren­forcent l’au­to­no­mie des lieux d’en­sei­gne­ment ne font que trans­fé­rer les com­pé­tences d’un éche­lon de la hié­rar­chie à un autre. Il faut lut­ter contre celles-ci.

En effet,

- ces réformes ren­forcent des ins­tances locales comme le conseil d’ad­mi­nis­tra­tion des éta­blis­se­ments du secon­daire et des uni­ver­si­tés. Or, ces ins­tances sont de plus en plus des chambres d’en­re­gis­tre­ment des déci­sions des chef·fes (pré­émi­nence des direc­tions, dans la dis­cus­sion et la prise de déci­sion au sein de ces ins­tances). On voit éga­le­ment appa­raître d’autres ins­tances comme les conseils péda­go­giques, ins­tances où les membres ne sont même pas élu·es démocratiquement ;

- dans le pre­mier degré, de nou­velles direc­tions pour­raient être créées, tenant d’ins­tau­rer un réel lien hié­rar­chique entre les direc­teurs et direc­trices et les enseignant·es ;

- l’autonomie ren­force l’ensemble de la chaîne hié­rar­chique au détri­ment des per­son­nels en créant des hié­rar­chies inter­mé­diaires. Les éche­lons hié­rar­chiques sont donc éten­dus à de nou­veaux lieux de tra­vail comme les écoles pri­maires empê­chant les pos­si­bi­li­tés d’au­to-orga­ni­sa­tion par un maillage de sur­veillance res­ser­ré et per­ma­nent. Les agent·es en font les frais depuis long­temps, entre le dépar­te­ment ou la région, les chef·fes d’é­ta­blis­se­ment et les gestionnaires ;

- De plus, les hié­rar­chies inter­mé­diaires réduisent notre capa­ci­té à ins­tau­rer un rap­port de force. Les chef·fes que nous avons face à nous peuvent très faci­le­ment se dédoua­ner en rap­pe­lant qu’ils ou elles sont de simples exécutant⋅es des déci­sions ministérielles.

- cette réor­ga­ni­sa­tion des lieux d’en­sei­gne­ment est au ser­vice d’une pri­va­ti­sa­tion ram­pante de l’Éducation natio­nale, de l’enseignement supé­rieur et de la recherche :

- Dans l’enseignement supé­rieur et la recherche, l’autonomie mana­gé­riale per­met l’accroissement du pou­voir des président·es d’université dans un cadre natio­nal de plus en plus déré­gu­lé : logique de ges­tion locale de la pénu­rie ; recours mas­sif aux contrats pré­caires pour toutes les caté­go­ries de per­son­nels ; indi­vi­dua­li­sa­tion des congés, décharges d’enseignement, primes et pro­mo­tions ; mar­gi­na­li­sa­tion des ins­tances élues au pro­fit de direc­toires ; déro­ga­tions au Code de l’éducation ; diplômes locaux payants. Ce qui est visé, c’est la remise en cause du sta­tut de fonc­tion­naire pour toutes les caté­go­ries de per­son­nels, la mise en concur­rence crois­sante à tous les niveaux, la des­truc­tion des col­lec­tifs de tra­vail et des soli­da­ri­tés qui y sont asso­ciées, la des­truc­tion du maillage ter­ri­to­rial de l’université publique, l’abandon du cadrage natio­nal des diplômes, l’augmentation des frais d’inscription à l’université… A l’i­mage de la loi Blanquer sur l’é­cole de la confiance, c’est une véri­table reféo­da­li­sa­tion de l’u­ni­ver­si­té qui est mise en perspective.

- Dans le secon­daire, l’autonomie des éta­blis­se­ments par­ti­cipe à la logique, reven­di­quée par la loi de trans­for­ma­tion de la fonc­tion publique de 2019, d’un rem­pla­ce­ment pro­gres­sif des fonc­tion­naires par des recru­te­ments de contractuel⋅les, notam­ment en confé­rant aux chef·fes d’établissement (ou aux rec­to­rats) un pou­voir de recru­te­ment de plus en plus fort au détri­ment du sys­tème de muta­tions contrô­lé par les com­mis­sions pari­taires qui ont dis­pa­ru. Par ailleurs, le décret n° 2020 – 1030 du 11 août 2020 rela­tif aux per­son­nels de direc­tion d’établissement d’enseignement ou de for­ma­tion rele­vant du ministre de l’Éducation natio­nale ouvre doré­na­vant les concours de recru­te­ment aux per­sonnes venant du pri­vé, porte d’en­trée sup­plé­men­taire des logiques mana­gé­riales délé­tères qu’on a pu voir à l’œuvre dans d’autres secteurs.

- les formes d’au­to­no­mie actuelles ren­forcent les inéga­li­tés dans l’ac­cès à l’é­du­ca­tion et entre les per­son­nels et s’ins­crivent dans une logique délé­tère d’é­va­lua­tion de la per­for­mance, pré­vue pour tous les ser­vices publics par la Loi orga­nique des lois de finance (LOLF) de 2001. Les lieux d’en­sei­gne­ment sont ain­si tenus de pro­duire des indi­ca­teurs chif­frés et de pas­ser des « contrats d’objectifs ».

- enfin, l’autonomie amène les éta­blis­se­ments du secon­daire, pour être « attrac­tifs » par rap­port aux autres éta­blis­se­ments publics et pri­vés, à pro­po­ser des conte­nus d’en­sei­gne­ment qui ren­forcent en réa­li­té les inéga­li­tés de classe. Aux éta­blis­se­ments favo­ri­sés les ensei­gne­ments et filières socia­le­ment valo­ri­sées (de type études longues, latin, alle­mand et classes euro­péennes) ; aux éta­blis­se­ments popu­laires les ensei­gne­ments et filières socia­le­ment déva­lo­ri­sées (une grande par­tie de l’enseignement pro­fes­sion­nel, voies courtes).

Il est impor­tant de prendre la mesure de la gra­vi­té de cette situa­tion, puisque ce ren­for­ce­ment hié­rar­chique est res­pon­sable de souf­france au tra­vail, de burn-out, voire de suicides.

Les com­pé­tences concer­nées par l’au­to­no­mie doivent donc être trans­fé­rées à l’ensemble de la com­mu­nau­té édu­ca­tive, et non aux fonc­tions de président·e d’u­ni­ver­si­té, de chef·fe d’établissement ou d’inspecteur·trice qui doivent être abolies.

Face à ces constats, il convient de réflé­chir à une autre orga­ni­sa­tion afin d’al­ler vers une école auto­gé­rée, éman­ci­pa­trice et libératrice.

Syndicat de trans­for­ma­tion sociale, SUD Éducation lutte pour une socié­té éga­li­taire, sans chef·fe, auto­gé­rée. Le mode d’or­ga­ni­sa­tion pyra­mi­dal, dévas­ta­teur, ren­force les inéga­li­tés pré­sentes dans la socié­té. Notre posi­tion­ne­ment anti­hié­rar­chique ne peut pas être décor­ré­lé de notre démarche autogestionnaire.

Dans nos pratiques,

- le recours juri­dique ne doit pas être le seul pro­cé­dé d’ac­tion contre la hié­rar­chie, car le conte­nu (ou l’ab­sence de conte­nu) de la loi et son inter­pré­ta­tion par cer­taines juges ne sont pas tou­jours de nature à favo­ri­ser les inté­rêts des per­son­nels, ni des usagèr·es. L’action juri­dique ne doit donc pas se faire au détri­ment de l’ins­tau­ra­tion d’un rap­port de force par d’autres moyens (grève, déso­béis­sance…) pour gagner les conflits ;

- SUD édu­ca­tion consi­dère qu’il faut construire du col­lec­tif sur nos lieux de tra­vail afin de peser dans le rap­port de force. Diffusons l’idée d’aller voir les chef·fes à plu­sieurs. Il est fon­da­men­tal que les per­son­nels titu­laires s’impliquent dans les luttes inter­ca­té­go­rielles, par exemple en sou­te­nant les luttes des précaires ;

- Les outils numé­riques com­portent des fonc­tions utiles et néces­saires pour l’ensemble de la com­mu­nau­té édu­ca­tive. Il importe qu’ils ne soient uti­li­sés qu’à des fins péda­go­giques et de vie sco­laire et que la sécu­ri­té et la confi­den­tia­li­té des don­nées soient garan­ties. Pour cela, il paraît, a mini­ma, néces­saire que ces outils numé­riques soient pro­duits par le ser­vice public et non par des pres­ta­taires privés.

- refu­sons éga­le­ment le fli­cage des per­son­nels par la hié­rar­chie. Refusons ou tout du moins inter­ro­geons la hié­rar­chie sur les signa­tures que l’on nous demande quand on assiste aux conseils de classe, aux réunions, aux for­ma­tions. Réaffirmons notre cri­tique des pro­cé­dures d’inspection, infan­ti­li­santes et arbi­traires. Rappelons le droit de les contes­ter, voire de les refu­ser. Revendiquons des éva­lua­tions col­lec­tives entre pairs, des temps de concer­ta­tion entre pairs, décon­nec­tés de l’avancement de car­rière. Luttons col­lec­ti­ve­ment pour impo­ser que le cahier de texte numé­rique ne soit plus une obli­ga­tion réglementaire.

- com­bat­tons sans relâche les sanc­tions dis­ci­pli­naires injus­ti­fiées, et en par­ti­cu­lier celles s’at­ta­quant aux droits syn­di­caux, droit de grève, comme ce fut le cas récem­ment avec les « 4 de Melle » et les « 3 de Bordeaux », l’ar­ticle 1 de loi de l’é­cole de la confiance ou plus géné­ra­le­ment avec les attaques répé­tées de la hié­rar­chie depuis le début de l’ère Blanquer ;

- deman­dons des direc­tions col­lé­giales dans les écoles pri­maires, avec une répar­ti­tion de la décharge déci­dée par l’é­quipe péda­go­gique et éten­dons ce fonc­tion­ne­ment admi­nis­tra­tif au secon­daire et au supérieur.

- Initions, par­tout où c’est pos­sible, des direc­tions col­lé­giales dans les écoles pri­maires, avec une répar­ti­tion de la décharge déci­dée par l’équipe péda­go­gique et éten­dons ce fonc­tion­ne­ment admi­nis­tra­tif au secondaire.

- dénon­çons les obli­ga­tions que nous consi­dé­rons contraires à l’intérêt col­lec­tif, comme le fait d’afficher un dra­peau et la Marseillaise dans sa classe ou les dis­po­si­tifs tel que les PPMS intru­sion (atten­tat) ;

L’autogestion doit être le modèle d’or­ga­ni­sa­tion que nous défen­dons pour pou­voir lut­ter acti­ve­ment contre la hié­rar­chie. il est néces­saire que chacun·e puisse prendre part aux déci­sions qui le·la concerne. Seule la com­mu­nau­té édu­ca­tive est légi­time et capable de s’administrer.

Soyons cri­tiques envers les conseils péda­go­giques ou les conseils d’administration qui n’ont bien sou­vent qu’un rôle consul­ta­tif. Instances que les chef·fes d’établissement peuvent ins­tru­men­ta­li­ser à leur guise. En fonc­tion des situa­tions locales, réap­pro­prions-nous ces ins­tances offi­cielles pour faire vivre des pra­tiques démo­cra­tiques, en exi­geant les votes à bul­le­tin secret, en deman­dant à ce que tous les votes : pour, contre, abs­ten­tion et NPPV soient comp­ta­bi­li­sés, boycottons-les,envahissons-les, … L’important est de construire un rap­port de force. Organisons-nous et exi­geons de vrais espaces déci­sion­nels où les per­son­nels peuvent se réunir tou·tes ensemble sans la pré­sence des hiérarchies.

Pour que l’au­to­ges­tion se retrouve éga­le­ment dans notre quo­ti­dien, dénon­çons les par­te­na­riats de l’Éducation natio­nale avec cer­taines mul­ti­na­tio­nales dans le domaine, par exemple, de l’in­for­ma­tique, et pri­vi­lé­gions l’u­ti­li­sa­tion de logi­ciels libres, dont les valeurs sont celles que nous défen­dons. De même, dénon­çons la pri­va­ti­sa­tion des mis­sions d’orientation et d’information aux métiers. En outre, il est indis­pen­sable que le per­son­nel s’approprie les moyens et outils de leur tra­vail et de leurs pra­tiques. En infor­ma­tique par exemple, ce sont les per­son­nels qui doivent être déci­sion­naires dans le choix des outils, maté­riels ou/​et logi­ciels et ne plus subir les dota­tions des tutelles territoriales.

L’expertise ou la spé­cia­li­sa­tion syn­di­cale est l’anti-chambre de la bureau­cra­tie et la rota­tion des tâches et des man­dats est le moyen le plus évident d’y remé­dier. A tous les niveaux de fonc­tion­ne­ment des syn­di­cats (réunions, fonc­tion­ne­ment, etc.) elle per­met d’inclure et d’impliquer davan­tage de cama­rades « inexpérimenté⋅es » mais aus­si d’éviter les logiques racistes et patriar­cales qui, mal­gré nos enga­ge­ments, per­durent dans nos pra­tiques. Ceci, aus­si bien dans un objec­tif d’u­ti­li­té et de pro­tec­tion du syn­di­cat que dans celui des valeurs que nous por­tons et de la co-for­ma­tion constante des camarades.

Enfin, dans les mobi­li­sa­tions et les luttes, nous tra­vaillons à la construc­tion de cadres d’au­to-orga­ni­sa­tion des col­lègues : AG, comi­tés de mobi­li­sa­tion, col­lec­tifs plus ou moins pérennes… Dans ces cadres, nous y défen­dons les pra­tiques de l’au­to­ges­tion, de la démo­cra­tie et de la lutte contre les oppressions.