« Devenir enseignant‑e », ce qu’il faut retenir de la contre-réforme en cours…

Un comité de la réforme s’est tenu le 22 janvier, SUD éducation vous informe des dernières informations retenues.

 

1. Une pré-professionnalisation = une main d’œuvre étudiante à bas coûts !

Il est désormais possible de devenir enseignant-e dès la seconde année de licence et ce jusqu’à la première année de master. Des contrats précaires pour étudiant-e-s mais pour le ministère, une aubaine d’avoir des « enseignant-e-s » sous-payé-es (services de 8h par semaine en école ou en collège) :

-          693€ en L2

-          963€ en L3

-          980€ en M1

Par ailleurs,  un dispositif sera créé dès la rentrée 2021 pour pré-professionnaliser les étudiant-e-s à devenir professeurs des écoles : le PPPE : il s'agira d'une classe préparatoire d'une durée de 3 ans dans laquelle les étudiant-e-s alterneront cours en lycée et à l'université. Les étudiant-e- suivront surtout des cours de disciplines scolaires avec quelques stages. Le PPPE s'adressera à 1200 étudiants par an soit 15% du total de lauréa-t-es par an au concours du CRPE.

Le ministère rappelle que ce dispositif est lancé pour permettre une démocratisation de l’accès aux métiers de l’enseignement mais ne nous a donné aucun critère concernant les modes de recrutement qui auront lieu au travers de Parcours Sup (hormis une attention en ce qui concerne les étudiant-es boursier-ères).

Nous nous interrogeons par ailleurs sur les moyens qui seront attribués aux lycées mettant en place ces dispositifs PPPE et sur le fait que par ce nouveau “parcours”, certains-es futur-es collègues auront eu moins accès à l’université que les autres.

 

2. Un master MEEF remanié qui sème la pagaille dans les INSPE !

Malgré les alertes lancées par les enseignant-e-s des INSPE en charge du master MEEF, le ministère s’entête sur une organisation qui fait toujours débat au sein des équipes universitaires :

-          800 heures de formation avec un cadrage flou en termes de contenus

-          33% des enseignant-es du master MEEF seront des enseignant-es exerçant par ailleurs en établissements scolaires

-          Mise en place d’outils d’évaluation qui mettront en concurrence les INSPE

-          Reprise en main par le ministère concernant la nomination des directeurs-trices d’INSPE au détriment de l’université

A l’heure où nous rédigeons ce tract, les plaquettes de master MEEF ne sont pas toutes remontées au ministère. Et pour cause, les “sujets zéros” explicitant les futurs concours d'enseignement n’ont pas été publiés!

  • Par ailleurs, les difficultés se multiplient concernant les organisations du futur Master MEEF, avec 3 acteurs majeurs: INSPE, Universités, Rectorats, DSDEN:
  • gérer la multiplicité des parcours présents dans les Inspé à la rentrée 2021:
    • les étudiant-es alternant-es M2 (ancienne promo de M1 de l'année 2020-2021)
    • les étudiant-es alternant-es M1 promo 2021-2022
    • les fonctionnaires stagiaires M2 MEEF alternant-es (ils doivent valider leur master 2 meef) du concours 2021
    • les fonctionnaires stagiaires déjà titulaires d'un M2 et donc inscrit-es en "parcours adapté"
  • déterminer les berceaux des futur-es alternant-es contractuel-les
  • affecter les futur-es étudiant-es alternant-es ainsi que les évaluateurs-trices
  • organiser les périodes de stage et les modalités

Attention, les contrats d’alternance ne seront pour l’instant pas possible pour tous les inscrit-es en master MEEF.

A ce jour, 12000 berceaux d’alternance sont annoncés pour la rentrée 2021 alors que l’on comptabilise 25000 places aux différents concours de l’enseignenement.

Les étudiant-es qui n’auront pas accès aux contrats d’alternance effectueront des périodes de Stage d’observation et de pratique accompagnée (stages SOPA). Ceux-ci pourraient être rémunérés mais là encore, aucune certitude!

 

3. Un concours réformé = une année de M2 intenable annoncée !

Dès 2022, les concours d’enseignant-es seront placés en fin de l’année de M2. Le ministère fait donc ici une sacrée économie puisque l’année de « fonctionnaire stagiaire » ne débutera qu’après l’obtention du master MEEF ET du concours !

On voit mal comment cette année de M2 permettra la réussite de chacun-e :

-          Un concours à préparer

-          Un master à valider

-          Une classe en responsabilité à tiers-temps pour les alternant-es

On peut d’ores et déjà imaginer qu’il y aura probablement de nombreux « reçu-e-s-collé-e-s » qui auront soit échoué au concours, soit au master !

Encore une manière détournée pour le ministère d’avoir là un vivier de futur-e-s collègues contractuel-les précaires et sous-payé-e-s qui pourront être embauché-es en attendant de valider ce qu’on peut appeler un véritable « parcours du combattant » !

Si le ministère se targue de proposer un nouveau master attractif, plus professionnalisant, SUD éducation dénonce  la précarisation accentuée qui s’y inscrit et l’impréparation à peine cachée de tous les services alors même que l’intersyndicale nationale demande la suspension de cette réforme depuis des mois.

 

4. Une entrée dans le métier avec ou sans filet!

Avec la future réforme annoncée, l’Etat “économise” une année de rémunération pour tou-tes ses agent-es puisque, de fait, l’année de fonctionnaire stagiaire débutera sous condition d’obtention du concours ET d’un master.

Plusieurs cas de figures co-existeront:

  • des enseignant-es stagiaires issu-es du master MEEF qui seraient à temps-plein en responsabilité de classe avec 20 jours de formations dans l’année.
    • Ceux-celles qui auront bénéficié du contrat d’alternance pourraient avoir un reclassement. Mais rien n’est encore décidé…
  • des enseignant-es stagiaires issues d’autres masters qui seraient à mi-temps en classe et à mi-temps en formation. Cette formation serait gérée par les INSPE.

 

Pour l’instant, outre les incertitudes qui demeurent scandaleuses à quelques mois de la mise en oeuvre réelle de cette réforme, nous n’avons aucune information concernant:

  • les modalités d’évaluation des stagiaires
  • les conditions (différenciées ou non) de titularisation
  • la valorisation (par reclassement) des stages et contrats effectués auparavant
  • le maintien de la prime d’entrée dans le métier

 

SUD éducation dénonce et appelle au retrait de cette contre-réforme et revendique :

Pour le recrutement :

  • Le retour à un concours de recrutement à Bac+3 (niveau licence), suivi de 2 années de formation rémunérées et validées par l’attribution d’un Master pour tou-t-e‑s les professeur-e‑s.

Pour l’année de stage ( à partir de bac + 3) :

  • Un allègement de service : pas plus d’un tiers du temps de service devant les classes
  • Une formation renforcée sur le temps de service, assurée par des formateurs-trices pour tou-te‑s les stagiaires
  • Une formation de qualité avec une décharge de service pour les tuteurs et les tutrices
  • Un dispositif particulier pour soutenir ceux/celles qui sont en difficulté
  • Une formation aux pédagogies coopératives ou alternatives (Freinet, pédagogie nouvelle, pédagogie institutionnelle, GFEN, etc) pendant la formation initiale
  • Une harmonisation des procédures de titularisation dans toutes les académies, garantissant l’équité et les droits des stagiaires avec un contrôle paritaire lors des étapes de titularisation.